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Allergologie

Publié le 03 oct 2022Lecture 5 min

L’ambroisie et les Astéracées. Beaucoup de plantes invasives et des pollens très allergisants

Guy DUTAU, allergologue, pneumologue, pédiatre, Toulouse

L’ambroisie (Ambrosia artemisiifolia, angl. : ragweed) est une plante composée originaire d’Amérique du Nord. C’est l’un des principaux pollens allergisants de la côte Est des États-Unis, bien connu des allergologues et proche parent de l’armoise (Artemisia vulgaris, angl. : mugwort). Ces plantes appartiennent à la famille des Astéracées ou Composées qui comportent près de 23 500 espèces réparties au moins en 1 600 genres, ce qui représente la deuxième famille du monde végétal après les Orchidacées qui comptent plus de 25 000 espèces. Les Astéracées sont diverses en fonction de l’aspect de leurs fleurs : liguliflores (chicorée), tubuliflores (chardons), labiatiflores (plantes ligneuses tropicales comme Mutisia ou Fleur de Patagonie), et radiées (marguerites, asters, séneçon)(a).

L’ambroisie appartient au groupe des « plantes invasives » qui comportent aussi le séneçon du Cap(b), la berce du Caucase(c), le datura (ou herbe au diable)(d), l’orobranche(e), etc. Les conséquences néfastes de ces plantes invasives sont de 3 sortes : environnementales (modification des écosystèmes) ; sanitaires (fort potentiel allergisant de la plupart de leurs pollens) ; économiques (baisse du rendement des cultures où elles s’implantent)(f) (figures 1 et 2). Figure 1. Séneçon du Cap, dit également de Mazamet. Figure 2. Datura stramoine (Datura stramonium). Plante très invasive et toxique de la famille des Solanacées. Ses nombreux noms vernaculaires (herbe aux fous, pomme épineuse, herbe aux taupes, chasse-taupe, herbe du diable, herbe aux sorciers endormeuse, pomme poison, trompette des anges, herbe Jimson ou trompette de la mort) évoquent la forme de la fleur ou la toxicité de la plante. Son absorption (ingestion ou inhalation) est source d’hallucinations, de comportements anormaux, de confusion mentale, d’amnésie, de délires conduisant parfois au coma puis à un arrêt cardiaque et respiratoire.   L’ambroisie est apparue dans la région lyonnaise vers les années 1960, mais elle aurait été introduite plus tôt en France à la fin du XXe siècle(g). L’Observatoire des Ambroisies fait état de coûts élevés qui se chiffraient autour de 16 millions d’euros, uniquement pour les 200 000 personnes qui avaient dû recevoir des traitements pour une allergie à l’ambroisie. L’ambroisie a ensuite progressé du Nord au Sud dans la vallée du Rhône(h) où elle a supplanté l’armoise. Elle s’est ensuite étendue à la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, l’Aquitaine, Midi-Pyrénées, Poitou-Charentes, etc. L’ANSES a publié en 2020 une liste d’actions coordonnées pour limiter sa propagation en matière de prévention, de lutte et de surveillance(i). Comme la plupart des plantes invasives, elle se multiplie dans les terrains en friche, le long des chemins et des routes, dans les sols nus et abandonnés. Elle se développe aussi dans les champs de maïs et surtout de tournesol, les chaumes(j), etc. (figures 3 et 4). Figure 3. Ambroisie avec de multiples inflorescences (Collection RNSA, 2022). Figure 4. Ambroisie adulte sans inflorescences dans un champ de blé (Collection RNSA, 2022).   Elle commence à pousser en mai, et atteint sa taille adulte (80 cm à 1 m) en août-septembre (pollinisation), se fane en octobre, et dissémine ses graines en novembre. Dès 1962, les risques de sa prolifération ont justifié la création de l’Association française d’études des ambroisies (AFEDA)(k). En 1995, une campagne d’éradication débuta dans les régions concernées, s’appuyant sur des arrêtés des préfets de la région et des départements concernés, puis dans le cadre plus global des PNSE (Plan National Santé-Environnement) : 2004-2008, 2009-2012, 2013-2017. La période de pollinisation de l’ambroisie est tardive et relativement courte, de mi-août à fin septembre. Ses pollens sont responsables de rhinites, de conjonctivites et/ou d’asthmes (50 % des sujets), souvent sévères, affectant les personnes de tous âges, enfants et adultes. D’autres symptômes sont possibles : toux, trachéite, urticaire, dermatite atopique. Au cours des 15 dernières années, des sensibilisations et allergies croisées « armoise/céleri » et «armoise/ litchis » ont été décrites. Dans les régions où la plante est abondante, 6 à 12 % de la population exposée aux pollens d’Ambrosia présentent des symptômes d’allergie à ses pollens. L’allergénicité des pollens d’ambroisie tient à la l’abondance de la plante, à la facilité de diffusion de ses pollens de petit calibre (légers), et au risque allergique indiqué de façon hebdomadaire par le RNSA (Réseau national de surveillance aérobiologique)(l) (figures 5 et 6). Figure 5. Carte du risque allergique de l’ambroisie en France en 2021 (Collection RNSA, 2022). Figure 6. Carte du risque allergique de l’ambroisie en Europe en 2021 (Collection RNSA, 2022). Depuis 2012-2013, il existe des Journées de lutte contre les ambroisies qui se situent dans la seconde quinzaine de juin(m). Elles ont pour principaux objectifs d’informer le public sur les risques allergiques de ses pollens, la prévention par l’alternance des cultures, l’arrachage manuel, le binage, etc. (encadré). L’allergie à l’ambroisie étant devenue un problème mondial (certains pays comme la Hongrie auraient des prévalences de sensibilisations dépassant 20 %-25 %), il n’est pas étonnant que des actions soient organisées dans le cadre plus large de l’International Ragweed Association(n).   Règlementation L’arrêté préfectoral n° 2000-3261 du 21 juillet 2000 stipule : les propriétaires, locataires, ayants-droit ou occupants à quelque titre que ce soit, les exploitants agricoles, les maîtres de chantiers de travaux et les gestionnaires de domaine public sont tenus de : i) prévenir la pousse d’ambroisie (sur terres rapportées ou remuées) ; ii) nettoyer et entretenir les espaces où pousse l’ambroisie. Tout contrevenant est passible de poursuites. En cas de défaillance, le maire peut faire procéder, aux frais des intéressés, à la destruction des plants d’ambroisie. En 2003, un arrêté s’adressant directement aux agriculteurs a été pris. Il concerne les jachères (arrêté préfectoral n° 2003-2008).   Le traitement des symptômes est celui de l’asthme (association de budésonide + formotérol pour le traitement de la crise et des exacerbations, et non bêta2-mimétiques de courte durée d’action, par exemple salbutamol seul, selon les nouvelles recommandations du GINA (Global Initiative for Asthma)(o), corticoïdes locaux oculaires et/ou nasaux (en cas de rhinite ou de conjonctivites associées), antihistaminiques H1 et, éventuellement, corticothérapie par voie générale dans quelques cas, de courte durée. L’immunothérapie spécifique par voie sublinguale permet d’induire une tolérance, de diminuer les symptômes allergiques ainsi que la consommation médicamenteuse.

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