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CONGRÈS

Publié le 26 avr 2021Lecture 5 min

Les exacerbations en pneumologie

Michèle DEKER, Paris

Les exacerbations sont un véritable fardeau, dans la BPCO comme dans l’asthme sévère. Il est possible de soulager ce fardeau grâce à un traitement adapté et personnalisé. La prédiction des exacerbations est un enjeu majeur à cet égard. Outre les scores cliniques, les moyens offerts par les outils connectés permettent d’améliorer la prédiction et de guider la prise en charge.

Cette maladie se caractérise par un déclin progressif de la fonction respiratoire, accéléré par le tabagisme. Les cohortes, telle la cohorte ELIPSE, ont permis de mieux connaître le profil des exacerbateurs en montrant le lien entre la fréquence des exacerbations et la sévérité de la maladie mesurée par l’obstruction bronchique, ainsi que l’évolution des exacerbations dans le temps (la survenue d’exacerbations est prédictive de leur répétition). D’autres paramètres sont fortement liés à la survenue d’exacerbations, en particulier la dyspnée, l'éosinophilie et les comorbidités, notamment cardiovasculaires. Le temps de récupération après l’exacerbation est long, en moyenne 10 jours, et retentit fortement et durablement sur la qualité de vie. La fréquence des exacerbations est corrélée avec le déclin accéléré du VEMS, surtout au début de la maladie, et ce quel que soit le traitement inhalé de fond. Au final, les exacerbations sont corrélées à la mortalité à mesure que leur fréquence s’accélère. Il semble que les traitements inhalés soient efficaces sur les exacerbations, en particulier la trithérapie. Peut-on prédire une exacerbation de BPCO ? Cet objectif est justifié pour deux raisons : d’abord les exacerbations sont à l’origine d’un déclin accéléré et source d’un cercle vicieux, avec une détérioration de l’activité physique, de la qualité de vie et de la santé mentale, une répétition des exacerbations et une augmentation de la mortalité. Cette prédiction permettrait aussi de proposer des prises en charge personnalisées, notamment d’avoir une prise en charge précoce et plus efficace de l’exacerbation, idéalement en évitant les hospitalisations. Les exacerbations sont favorisées par des facteurs externes (pollution, conditions atmosphériques, infections virales) et des facteurs liés au patient : histoire des exacerbations, fonction respiratoire, comorbidités, dépression, altération de la qualité de vie, éosinophilie. En effet, la BPCO est une maladie systémique dont les exacerbations ne sont pas uniquement respiratoires. Le patient ayant une BPCO relève ainsi de plusieurs phénotypes différents : aux deux extrêmes, d’un côté, les BPCO « systémiques » chez des patients en surpoids, avec atteintes cardiovasculaires multiples et une pathologie respiratoire relativement modeste ; de l’autre, des patients ayant une atteinte respiratoire sévère, s’accompagnant de cachexie, emphysème, réduction de l’activité physique, ostéoporose. Les causes d’exacerbation varient selon ces phénotypes. Le nombre d’exacerbations précédentes est le meilleur prédicteur des exacerbations. Un nouveau score vient d’être publié, ACCEPT, qui combine plusieurs types de facteurs, tels que l’âge, l’ancienneté de la BPCO, les valeurs fonctionnelles respiratoires, les exacerbations précédentes, la poursuite du tabagisme, des facteurs d’essoufflement, des marqueurs de comorbidité et des marqueurs de prise en charge, etc. La prédiction est améliorée en utilisant ce questionnaire, comparativement à la prise en compte des antécédents d’exacerbation seulement. Chez les exacerbateurs fréquents, l’enjeu est de reconnaître précocement une nouvelle exacerbation pour la prendre en charge rapidement. L’utilisation d’objets connectés participe à cette détection précoce (spiromètres, capteurs de toux, moniteurs de pression artérielle, oxymètre, applications smartphone pour reconnaître la dyspnée, etc.). L’utilisation répétée des outils de mesure de la fonction respiratoire améliore la prédiction. Chez les patients sous ventilation non invasive, l’analyse répétée des paramètres du respirateur (fréquence ventilatoire, nombre de cycles déclenchés par le patient, synchronisation avec le ventilateur) permet de détecter précocement les exacerbations. Approches pharmacologiques Une prise en charge personnalisée est la plus adaptée, en pesant les bénéfices/risques des traitements pharmacologiques. La réhabilitation respiratoire reste néanmoins la pierre angulaire du traitement avec le sevrage tabagique et les vaccinations disponibles. Chez un patient exacerbateur ne recevant pas encore de traitement, on peut proposer un anticholinergique de longue durée d’action (LAMA) ou un bêta-2 mimétique de longue durée d’action (LABA) . Une étude a montré un bénéfice supérieur sur les exacerbations avec un LAMA versus un LABA (-17 %), avec des effets indésirables similaires, et un délai retardé de la première exacerbation sévère. Après la monothérapie, quelle place pour les corticoïdes inhalés (CSI) ? La diminution des exacerbations est d’autant plus importante sous CSI que les patients ont une éosinophilie élevée. Faut-il préférer une bithérapie LABA/LAMA ou CSI/LABA ? Dans l’étude FLAME, la double bronchodilatation LABA/LAMA a permis une diminution de la probabilité d’exacerbation modérée à sévère versus CSI/ LABA de 11 % et une réduction encore plus importante dans les exacerbations sévères (-17 %). Il existe des effets indésirables à type de pneumopathie, dysphonie, candidose. La triple association CSI/ LABA/LAMA a été comparée à la bithérapie LABA/LAMA ; elle permet une réduction des exacerbations modérées à sévères, d’autant plus importante que le patient est sous double bronchodilatation (réduction > 20 % des exacerbations modérées à sévères) ; il existe aussi un impact sur le délai de survenue de la première exacerbation, allongé chez les patients sous trithérapie. L’étude ETHOS confirme la supériorité de la trithérapie CSI/LABA/LAMA versus LAMA/LABA ou CSI/LABA (Robe KF et al. N Engl J Med 2020). Le bénéfice de la trithérapie est supérieur chez les patients dont l’éosinophilie est plus élevée. Qu'en est-il dans l'asthme ? Certains patients ont un profil exacerbateur : notamment ceux qui ont une éosinophilie élevée, ou un asthme associé à une polypose naso-sinusienne, un reflux gastro-œsophagien ou une sinusite chronique, et chez les sujets adultes non atopiques. L’omalizumab, indiqué dans l’asthme sévère allergique non contrôlé malgré un traitement maximal, réduit le risque d’exacerbations, notamment d’exacerbations sévères de 50 % comparativement au placebo. D’autres biothérapies sont proposées : un anti-IL-5, le mépolizumab indiqué dans l’asthme sévère éosinophilique, réduit d’environ 50 % les exacerbations ; le benralizumab dans la même indication permet aussi une réduction des exacerbations de 30 à 50 % selon le schéma thérapeutique toutes les 4 ou 8 semaines. Dans l’étude BORA, la réduction des exacerbations perdure dans le temps (au moins 2 ans). La dernière biothérapie commercialisée en France, le dupilumab, diminue d’environ 50 % les exacerbations, réduction d’autant plus importante que l’éosinophilie est ≥ 300/mm3 et le FeNO ≥ 50 ppb, chez les asthmatiques sévères avec hyperéosinophilie. Enfin, le tezepelumab, anti-TLSP, a montré une efficacité dans une étude de phase 2 chez des asthmatiques modérés et sévères avec une réduction des exacerbations de 60 à 70 %. La mise en route d’une biothérapie mérite d’être discutée en réunion de consultation afin de choisir au mieux la molécule convenant le mieux au profil.

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