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Allergologie

Publié le 24 mar 2013Lecture 9 min

Rhinite allergique : que doit connaître l’ORL pour sa pratique ?

M. DROUET, CHU d’Angers
La rhinite allergique est une pathologie certes bénigne, mais qui retentit fortement sur la qualité de vie du patient. Une prise en charge adaptée, et donc l’identification de la nature allergique, est fondamentale. Nous résumons les divers moyens d’y parvenir. 
L'origine allergique d’une rhinite entraîne en général un tableau de rhinite chronique, sauf étiologie ponctuelle très particulière. La rhinite allergologique va donc se présenter en diagnostic différentiel des autres rhinites chroniques : rhinites médicamenteuses, rhinites professionnelles non allergiques, rhinites hormonales, NARES, rhinites par agents irritants, rhinites atrophiques, alimentaire non allergique, rhinites diabétiques, etc. Auparavant, pour la rhinite allergique, on évoquait la notion de rhinite saisonnière (saison à préciser) ou perannuelle. Actuellement, les recommandations, en particulier le consensus international ARIA (Allergic Rhinitis Impact on Asthma), conseillent d’évoquer plutôt la rhinite persistante (plus de 4 semaines) ou intermittente (moins de 4 semaines), qui peut être sévère (avec retentissement sur la qualité de vie du patient) ou légère.   Une définition précise   La rhinite allergique se définit par un ensemble de manifestations fonctionnelles nasales engendrées par le développement d’une inflammation IgEdépendante de la muqueuse nasale, en réponse à une exposition à différents types d’allergènes. Cette définition sous-tend que la réaction allergique est de type hypersensibilité immédiate (type 1 de la classification de Gell & Combs, donc IgE-dépendante) et exclut les autres types d’hypersensibilité. Différents types d’allergènes, mais essentiellement des pneumallergènes, sont responsables de la rhinite allergique. La rhinite allergique peut être isolée ou associée à d’autres symptômes allergiques, et en particulier il conviendra de rechercher un asthme associé(1). L’inflammation de la rhinite allergique est la conséquence d’une hypersensibilité immédiate due aux IgE anti-allergènes. Les arguments anamnestiques en faveur de la rhinite allergique   La symptomatologie associe rhinorrhée, obstruction nasale, éternuement et prurit. Le caractère bilatéral est quasi constant dans la rhinite allergique. La rhinite allergique parmi les autres rhinites chroniques.  Il peut y avoir une symptomatologie associée, elle-même évocatrice d’allergie (conjonctivite, et/ou asthme, et/ou manifestations cutanées du syndrome dermorespiratoire telles que la dermatite atopique par exemple). L’anamnèse est également très importante pour orienter le bilan allergologique car le patient a souvent remarqué des facteurs déclenchants évocateurs (expositions allergéniques précises ou chronologie professionnelle par exemple).   Le bilan allergologique   Orienté par l’anamnèse, il va comporter les tests cutanés, des examens biologiques et, éventuellement, un test de provocation nasale. Les tests cutanés Ce sont des tests d’allergie immédiate. Il s’agit essentiellement de prick-tests, mais il faut savoir que dans certains cas, le prick-test peut manquer de sensibilité (fausse négativité). Lorsque cela est possible, l’intradermo- réaction (IDR) peut être utile ; plus sensible mais moins spécifique, elle peut donc à l’inverse donner des faux positifs). Sur le plan biologique, le dosage d’IgE totales pour dépister le terrain allergique n’est pratiquement plus effectué (peu sensible, peu spécifique). Il a été avantageusement remplacé par la pratique de l’ImmunoCap® Phadiatop (dosage d’IgE spécifiques dirigées contre un mélange de pneumallergènes pour le Phadiatop adulte et éventuellement un mélange d’aliments pour le Phadiatop pédiatrique). Le dosage d’IgE totales peut rester utile pour les spécialistes de l’Allergologie, car il permet de « recadrer » les IgE spécifiques : par exemple, des IgE spécifiques pour les acariens à 10 kUA/l n’ont pas forcément la même signification si le taux d’IgE totales est à 50 kU/l ou à 2 000 kU/l. L’imputabilité des acariens est beaucoup plus forte chez le patient qui a des IgE totales à 50 kU/l (ratio plus évocateur). Il faut toutefois souligner que la nomenclature actuelle n’autorise pas les dosages simultanés d’IgE totales et d’IgE spécifiques. Les IgE spécifiques dirigées contre un allergène peuvent être dosées à l’égard de nombreux allergènes. Les résultats sont rendus en kUA/l, et l’on considère qu’un résultat est positif au-delà de 0,10 kUA/l. Il est toutefois évident que l’imputabilité de l’allergène est d’autant plus probable que le résultat est élevé. On peut depuis quelques années demander également des IgE spécifiques dirigées contre certains déterminants antigéniques de l’allergène (par exemple, IgE spécifiques anti-Feld 1) pour rechercher une allergie à l’allergène majeur du chat plutôt que des IgE spécifiques anti-chat. Il existe de nombreux dosages antigènes recombinants, tant dans le domaine des pneumallergènes que des aliments, qui permettent globalement de faire le tri entre les allergènes dit majeurs (qui expliquent la sensibilisation chez la majorité des patients allergiques à cet allergène) et dit mineurs (déterminants moins présents dans la population allergique à cet allergène). Cette notion de déterminants majeurs et mineurs n’est pas nécessairement superposable à la clinique. En effet, un allergène mineur selon la définition ci-dessus (peu de patients sensibilisés à ce déterminant dans la population allergique à cet allergène) peut être tout à fait majeur cliniquement pour un patient précis. Cette ambivalence sémantique est parfois un peu préjudiciable et source de malentendus. Le test de provocation nasale cherche à reproduire une réaction nasale liée à l’allergène. Ces tests ne sont pas parfaitement standardisés et nécessitent une bonne expérience de la part du médecin qui les pratique. Le test débute par une inhalation de sérum physiologique, pour éliminer une hyperréactivité nasale non spécifique, puis l’allergène est appliqué ou pulvérisé sur la muqueuse nasale selon des concentrations croissantes. La positivité du test est évaluée par le score clinique et éventuellement des mesures rhinomanométriques. Ce test n’a véritablement d’intérêt qu’en cas de discordance entre l’histoire clinique et les examens cutanés et/ou les IgE spécifiques. Il peut également être intéressant en cas de polysensibilisation quand la clinique ne permet pas de départager les différents allergènes. Ce test de provocation nasale n’est pas infaillible. Il peut y avoir des faux négatifs, notamment lorsqu’on recourt aux extraits allergéniques pour la réalisation du test. En effet, les extraits allergéniques sont standardisés avec les allergènes majeurs, et même s’ils contiennent quand même des allergènes mineurs, ces derniers sont parfois trop peu présents pour déclencher une symptomatologie ORL chez un patient qui ne serait allergique qu’à l’allergène mineur. Il peut s’avérer très utile dans les rhinites professionnelles(2). Le diagnostic positif d’une rhinite allergique repose sur un faisceau d’arguments qui part de l’histoire clinique du patient, inclut les tests cutanés et éventuellement le dosage d’IgE spécifiques. Le test de provocation nasale peut avoir sa place en cas de discordance entre ces éléments. Quels sont les allergènes à tester dans un bilan allergologique ?   Pneumallergènes ou aéroallergènes sont responsables de la majorité des rhinites allergiques. La liste en est variée: acariens, poils d’animaux, diverses moisissures, divers pollens, allergènes professionnels (acariens de stockage chez les agriculteurs ou professions exposées aux farines de blé, etc.). La rhinite médicamenteuse ne relève en principe pas d’un mécanisme allergique et le bilan allergologique a peu d’intérêt (par exemple dans les obstructions nasales du syndrome de Fernand Widal avec intolérance médicamenteuse). Enfin, les aliments peuvent être testés en sachant qu’une rhinite persistante et chronique, qui serait due à une allergie alimentaire, ne pourrait guère être expliquée que par un aliment couramment consommé. Deux aliments sont donc prioritairement suspects : le lait de vache et le blé. Une situation qui peut mériter de tester les aliments est la suivante : rhinite manifestement d’allure allergique (symptômes évocateurs — aucune influence de l’environnement — réponse favorable aux traitements antiallergiques) chez un enfant jeune avec bilan aux pneumallergènes négatifs. (Ce raisonnement peut être étendu à l’asthme allergique chez l’enfant.) Dans ce domaine de l’allergie alimentaire, il n’est peut-être pas superflu d’adjoindre aux tests d’allergie immédiate des tests d’allergie retardée (épidermotests), bien que stricto sensu ce type d’hypersensibilité ne corresponde pas à la définition de la rhinite allergique. Le rôle des aliments dans la rhinite allergique est très souvent débattu, mais il y a toutefois peu de littérature sur ce sujet. La participation de la muqueuse pituitaire au processus allergique est néanmoins évidente dans la réaction anaphylactique par exemple, où il n’est pas rare de voir les patients débuter leur réaction allergique par des éternuements et une rhinorrhée inaugurant des réactions plus sévères. Un autre argument est la fréquence de survenue des signes ORL et de la toux lors des tentatives d’accoutumance ou de désensibilisation au lait de vache chez l’enfant. Cela démontre bien la participation de la muqueuse pituitaire à l’allergie alimentaire dans ce contexte anaphylactique. Toutefois les rhinites isolées d’origine alimentaire restent probablement rares. La question reste néanmoins posée d’une éventuelle sous-estimation par défaut de bilan orienté dans ce sens. Les aéro-allergènes sont les allergènes prioritaires à expertiser dans un bilan de rhinite allergique. En cas de négativité du bilan aux pneumallergènes, il n’est pas inutile d’étendre le bilan aux aliments couramment consommés, avec deux aliments cible : le lait de vache et la farine de blé. Rhinite allergique et immunothérapie spécifique (ITS)   L’ITS aux pneumallergènes a démontré son efficacité, tout particulièrement dans les rhinites allergiques. C’est le seul traitement qui réduit l’inflammation spécifique induite par un allergène et dont l’effet persiste au-delà de l’arrêt du traitement. On dispose aujourd’hui de nombreuses études contrôlées en double aveugle qui montrent l’intérêt de l’ITS par voie souscutanée(3) avec divers aéro-allergènes (graminées, acariens, bouleau, chat…). La voie sublinguale est également une voie validée pour acariens, bouleau, par exemple. Conclusion   La rhinite allergique est un diagnostic à évoquer cliniquement, qui doit être conforté par la pratique d’un bilan allergologique bien conduit (tests orientés par l’anamnèse) en tenant compte de la sensibilité et de la spécificité des tests.

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