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Stomatologie

Publié le 16 juin 2008Lecture 4 min

Que faire devant une hypertrophie gingivale chez un greffé sous ciclosporine ?

N. ELKIHAL, I. TADLAOUI, B. HASSAM et coll. Service de dermatologie, CHU Rabat (Maroc)
La ciclosporine (Neoral®) est un immunosuppresseur largement prescrit chez les greffés rénaux. Ses effets secondaires sont nombreux dominés par la néphrotoxicité, l'hypertension artérielle et l’atteinte cutanéo-muqueuse à type d’hypertrichose, d’infections virales et d’hyperplasie gingivale (1). Nous rapportons, ici, six cas d’hypertrophie gingivale chez des greffés rénaux sous ciclosporine.
Illustration : Hypertrophie gingivale chez un greffé rénal sous ciclosporine. Notre expérience Il s’agit d’une étude prospective portant sur l’ensemble des malades greffés rénaux suivis régulièrement en consultation de dermatologie. Les patients sont vus systématiquement tous les 6 mois et, au besoin, si une symptomatologie cutanée apparaît. Les manifestations cutanéo-muqueuses, et notamment une hypertrophie gingivale, ont été recherchées systématiquement lors de tous les contrôles. Résultats Sur 48 patients suivis, 6 avaient une hypertrophie gingivale, soit 12,5 %, avec une prédominance féminine (4/2). L’âge moyen était de 28,8 ans (extrêmes : 14 et 45 ans). Les patients étaient tous traités par corticothérapie à faible dose (5 à 10 mg), mycophénolate mofétil à raison de 1,5 g/j et ciclosporine à la dose de 150 à 250 mg/j. Un traitement antihypertenseur et un apport en calcium ou acide salicylé ont été prescrits dans certains cas. L’hypertrophie gingivale est apparue 7 mois en moyenne après le début du traitement (extrêmes : 6 mois et un an). Elle intéressait les maxillaires supérieur et inférieur chez deux patients ; chez les autres, elle siégeait au niveau du maxillaire inférieur (figure). Elle ne s’accompagnait pas de signes fonctionnels, notamment pas de douleur, ni de mauvaise haleine. Sur le plan thérapeutique, un traitement médical à base de macrolides, azithromycine à raison de 1 g/j pendant 4 jours a été essayé, mais sans amélioration chez l’ensemble des patients. Discussion Pour certains auteurs, l’hypertrophie gingivale sous ciclosporine est retrouvée dans 10 à 15 % (2) ; elle surviendrait, pour d’autres auteurs, surtout chez les adolescents et les enfants (entre 8 et 85 %) (1-3). Les hypertrophies gingivales secondaires à un traitement médicamenteux sont de plus en plus rapportées (inhibiteurs calciques, certains antiépileptiques [éthosuximide], tacrolimus…)(4-5), la ciclosporine étant un des médicaments responsables (2-6). L’hypertrophie gingivale débute habituellement dans les 3 mois suivant le début du traitement par ciclosporine, parfois plus tôt ou beaucoup plus tard, voire des années après (1). L’hypertrophie siège au niveau de la gencive labiale, mais s'étend par la suite sur la muqueuse kératinisée, pouvant parfois entraîner des signes fonctionnels importants (difficultés à la mastication, à l'élocution). Sur le plan histologique, on note sous un épithélium plus ou moins épaissi, une hyperplasie du tissu conjonctif et des vaisseaux, associée à un infiltrat inflammatoire lymphoplasmocytaire. En microscopie électronique, il existe une augmentation de l'activité des fibroblastes avec une synthèse protéique exagérée(1). L’hypothèse a été avancée que cette prolifération était médiée par le calcium intracellulaire, mais une étude réalisée par une équipe espagnole l’a infirmée (7). Plusieurs facteurs sont évoqués :    génétique : mise en évidence de fibroblastes gingivaux phénotypiquement différents selon les patients ;    local : rôle important de la mauvaise hygiène bucco-dentaire ;    thérapeutique : les études faites pour établir une corrélation entre la dose de ciclosporine et l'hyperplasie gingivale sont cependant discordantes (1). Traitement L’hypertrophie gingivale sous ciclosporine pose un problème de pérennité de la denture. Le traitement repose sur la prescription d’azithromycine dès l’installation de l’hypertrophie. En cas d’hypertrophie importante, la gingivectomie est proposée, suivie dans les 3 mois d’un traitement par l’azithromycine ; si possible, on diminue les doses de ciclosporine. Le traitement médical a été cependant essayé chez les patients de notre étude, mais sans résultats satisfaisants. Les récidives sont fréquentes, touchant souvent les mêmes patients, entraînant à long terme une destruction de l’os alvéolaire et, par conséquent, une mobilité dentaire. La prévention repose sur le suivi clinique, et les soins parodontaux réguliers et approfondis. Conclusion L’hypertrophie gingivale est un effet secondaire de la ciclosporine réversible à l’arrêt du traitement. Le problème chez les greffés rénaux est qu’il s’agit d’un traitement prescrit à vie qui ne peut être arrêté. Une fois installée, l’hypertrophie gingivale est difficile à traiter d’où l’intérêt majeur de la prévention.

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