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Asthme

Publié le 25 nov 2023Lecture 7 min

Asthme sévère : l’importance de remodelage bronchique

Denise CARO, Boulogne-Billancourt, d’après une émission réalisée par AXIS TV

La troisième émission de la série « Asthme sévère : comprendre et traiter », réalisée par Axis TV avec le soutien institutionnel du laboratoire Sanofi , était consacrée au rôle du remodelage bronchique dans l’asthme. Quels en sont les mécanismes et les conséquences ? Comment le chercher et l’évaluer ? Nous savons à présent que c’est un facteur majeur de l’évolution de l’asthme vers une forme sévère de la maladie. Mieux l’appréhender est une étape indispensable à l’identifi cation de stratégies préventives et curatives. Pour en parler, le Pr Anh-Tuan Dinh Xuan (pneumologue, hôpital Cochin, Paris) et le Dr Thibaud Soumagne (pneumologue, HEGP, Paris).

Le remodelage bronchique est une modification de la structure des bronches. « En présence d’asthme, le patient comme le médecin s’intéresse surtout aux symptômes et à leurs conséquences sur la fonction respiratoire, mais derrière cela, il y a un bouleversement profond des structures histologiques des voies aériennes auquel on pense moins mais qu’il importe de comprendre et de rechercher », a dit en introduction le Pr Dinh Xuan. Le remodelage bronchique chez l’asthmatique a pu être observé depuis longtemps sur des pièces histologiques. On a ainsi constaté la présence d’éosinophiles dans l’épithélium bronchique, une prolifération de fibroblastes et des fibres musculaires lisses rigides et épaissies. Ces modifications fonctionnelles et histologiques sont amplifiées du fait de l’inflammation. Le remodelage est le résultat d’agressions de l’épithélium bronchique, suivies d’un processus mal contrôlé de réparation tissulaire qui, lorsqu’il est normal, permet l’élimination des cellules lésées et leur remplacement par des cellules fonctionnelles. Quelquefois, ces agressions répétées échappent au processus normal de réparation, l’épithélium sécrète des molécules pro-inflammatoires et des facteurs de croissance (tels que le TGF-β) qui conduisent à une prolifération et une hypertrophie des fibroblastes et des fibres musculaires lisses, avec sécrétion de collagène et autres composants de la matrice extracellulaire ; ces phénomènes aboutissent à une fibrose sous-épithéliale et à des parois bronchiques rigides et épaissies(1). L’intensité et la sévérité de ces modifications tissulaires diffèrent selon les individus. Elles dépendent de facteurs génétiques, environnementaux (allergènes, irritants, etc.) et sont majorées par le vieillissement(2).   Responsabilité de la bronchoconstriction   « On sait aujourd’hui qu’il faut prendre en compte non seulement la tempête biochimique mais aussi la tempête mécanique. » La contraction bronchique exerce une contrainte mécanique sur les cellules épithéliales qui activent les facteurs de croissance et la synthèse de collagène déjà impliqués dans la réaction inflammatoire(3). « Ces contraintes mécaniques associées à l’inflammation participent à l’effet délétère d’un asthme mal contrôlé », a confirmé le Pr Dinh Xuan. C’est donc l’association de la réaction inflammatoire et des contraintes mécaniques qui est responsable du remodelage bronchique chez l’asthme sévère. Une publication récente a comparé les effets biologiques et le remodelage chez deux groupes de patients asthmatiques sévères, l’un avec une inflammation T2 et l’autre avec une inflammation non T2. Si les deux groupes avaient des différences concernant le type de cellules et de médiateurs inflammatoires, ils présentaient tous un remodelage bronchique. « Le remodelage bronchique devrait être au centre de nos préoccupations chez nos patients asthmatiques, a dit le Pr Dinh Xuan. Il commence tôt dans l’évolution de la maladie, puis continue à bas bruit sans qu’on s’en aperçoive. Probablement qu’au début il est plus ou moins réversible. Ensuite il devient plus important, avec pour conséquences, un rétrécissement de la lumière bronchique et des interventions thérapeutiques (notamment β2-mimétiques) de moins en moins efficaces. Les exacerbations aggravent encore la situation. » « Les asthmatiques sévères ont plus d’exacerbations et plus de remodelage, avec une fonction respiratoire plus altérée », confirme le Dr Thibaud Soumagne.   Un remodelage difficile à évaluer   Le remodelage bronchique est donc un facteur majeur de l’évolution de l’asthme vers une forme sévère de la maladie. L’étude des mécanismes physiopathologiques qui le sous-tendent est une étape indispensable à l’identification de stratégies préventives et curatives.   Mais comment évaluer le remodelage bronchique en pratique clinique ? Les techniques invasives telles que les biopsies fournissent des informations sur les altérations structurelles bronchiques et sur la présence de cellules inflammatoires et fibreuses dans des voies respiratoires. Mais elles ne peuvent être répétées, elles portent sur une très petite parcelle de tissu bronchique et ne renseignent pas sur les modifications distales au niveau des bronchioles. Des techniques non invasives ont été développées pour repérer des signes directs ou indirects du remodelage. Il importe de bien les connaître pour détecter le plus précocement possible ces modifications des voies respiratoires et, tenter, sinon de les stopper, au moins de ralentir leur progression(4). L’analyse des expectorations induites est un bon reflet de l’inflammation bronchique mais pas nécessairement du remodelage ; elle est difficile à réaliser en routine. De la même façon, la mesure de la fraction expirée de monoxyde d’azote (FeNO) est davantage un marqueur de l’inflammation que du remodelage. L’évaluation de la fonction pulmonaire par la mesure du VEMS à la spirométrie est plus intéressante. Elle est assez bien corrélée à l’épaisseur de la membrane basale et du muscle lisse ainsi qu’à la microvascularisation des bronches(5). Elle renseigne sur l’état des voies respiratoires à un instant t. En effet, le délai d’évolution de la maladie joue un rôle important ; plus l’asthme est ancien, plus la fonction respiratoire décline sans que l’on sache si cette détérioration est due au remodelage ou à d’autres facteurs(6). Quoi qu’il en soit, il est intéressant d’analyser de façon dynamique, l’évolution de l’inflammation et du remodelage au cours du temps chez des asthmatiques traités. L’administration d’un corticoïde inhalé chez des patients asthmatiques permet une amélioration de la fonction pulmonaire (augmentation du VEMS) durant les 3 premiers mois puis sa stabilisation. Il en est de même des marqueurs de l’inflammation T2. En revanche, l’effet sur le remodelage est beaucoup plus tardif, un tout début d’amélioration n’intervient qu’après au moins 12 mois de traitement(7). « On manque d’études suffisamment longues pour évaluer efficacement l’impact des traitements sur le remodelage, a noté le Dr Soumagne. Les essais avec les biothérapies montrent un effet plus ou moins important sur la fonction respiratoire, bénéfice qui se maintient dans le temps. Mais bien que prolongés, ils ne permettent pas d’avoir une idée réelle de l’impact du traitement sur le remodelage. »   La place grandissante de l’imagerie   Plus intéressantes pour juger du remodelage bronchique, les techniques d’imagerie sont les outils d’évaluation d’avenir. Les bronches peuvent être étudiées sur des images tomodensitométriques ; en pratiquant des segmentations, il est possible de mesurer la taille de la lumière et l’épaisseur de la bronche. Ces mesures sont assez bien corrélées au VEMS. Plus le VEMS est élevé plus la lumière est importante, plus il est altéré plus la paroi bronchique est épaissie(8). Les images tomodensitométriques sont également assez bien corrélées aux observations anatomocliniques faites à partir des biopsies(8). De plus, le scanner permet de quantifier le nombre de bronches, une raréfaction des bronches étant un signe d’asthme sévère(9). Enfin, bien qu’encore assez peu utilisé dans les études cliniques, cet examen d’imagerie a le mérite de fournir des indications sur l’impact des traitements. Un travail avec le mépolizumab montre, après un an de cet anticorps monoclonal, une diminution de l’épaisseur bronchique (faible mais significative)(10). Des résultats avec le dupilumab sont attendus prochainement. Un peu plus compliquée à mettre en œuvre que le scanner, l’IRM est une approche encore plus intéressante. Grâce à un gaz marqué à l’hélium que le patient respire, on voit les zones bien ventilées et celles moins bien ou non ventilées, signe d’obturation des bronchioles du fait du remodelage et/ou de l’inflammation(11). Ces zones avec un défect ventilatoire sont corrélées à la fonction respiratoire, avec l’éosinophilie sanguine ce sont des marqueurs prédictifs du nombre et de la sévérité des exacerbations(12). « C’est un élément important, a dit le Dr Soumagne, mais comme pour le VEMS, il faut s’interroger sur les responsabilités respectives du remodelage et de l’inflammation. Aussi a-t-on besoin d’une technique d’imagerie fiable, que l’on puisse répéter dans le temps, associée à des protocoles cliniques, pour évaluer l’efficacité des traitements sur la prévention du remodelage. On espère en effet que les biothérapies permettront de retarder sa formation ou de l’arrêter. Elles représentent un espoir chez les patients qui ne répondent plus aux CSI à fortes doses. Il faudrait aussi développer des outils capables de prédire la vulnérabilité d’un patient vis-à-vis du remodelage. » D’après une émission réalisée par AXIS TV à laquelle ont participé le Pr Anh-Tuan DINH XUAN (pneumologue, hôpital Cochin, Paris), le Dr Thibaud Soumagne (pneumologue, HEGP, Paris) et le Dr Olivier Chabot (modérateur) Avec le soutien institutionnel de

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