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Pneumologie

Publié le 20 sep 2023Lecture 4 min

Prise en charge de l’aspergillose broncho-pulmonaire allergique

Denise CARO, d’après les communications du Pr Cécile Chenivesse (Lille), du Dr Édouard Cuvillon (Valencienne) et du Dr Cendrine Godet (Paris), CFA 2023

L’aspergillose broncho-pulmonaire allergique (ABPA) est une maladie respiratoire rare caractérisée par une réaction immunologique complexe dirigée spécifiquement contre un champignon du genre Aspergillus ; elle touche des patients à risque (asthme, BPCO ou mucoviscidose). En 2021, l’ABPA (hors mucoviscidose) a fait l’objet d’un protocole national de soins(1).

L'Aspergillus responsable d’ABPA en France métropolitaine appartient le plus souvent à l’espèce fumigatus. A. fumigatus est une moisissure saprophyte présente dans le sol, les matières végétales en décomposition, le foin, mais aussi en milieu intérieur (matériaux de construction, isolants, humidificateurs, climatiseurs...). La prévalence de l’ABPA chez les patients asthmatiques varie de 0,7 % à 3,5 %. Elle est plus élevée en cas d’asthme sévère(2). L’ABPA est favorisée par une altération de la clairance mucociliaire (rôle du canal CFTR et d’un polymorphisme des protéines du surfactant pulmonaire) avec une prédisposition génétique. Les enzymes protéolytiques aspergillaires favorisent l’absorption des antigènes fungiques au niveau de la barrière épithéliale. L’inhalation répétée de spores d’A. fumigatus donne lieu à une réaction pulmonaire avec induction d’une réponse lymphocytaire T (Th2 CD4) et de la production d’anticorps IgE médiée de type I et IgG médiée de type III(3). L’inflammation des voies respiratoires conduit à la production d’un mucus dense riche en éosinophiles contenant des cristaux de Charcot-Leyden qui obstruent les voies respiratoires et favorisent le développement de bronchectasies.   CRITÈRES DIAGNOSTIQUES   L’âge de début de l’ABPA dépend du terrain sous-jacent : entre 34 et 57 ans chez l’asthmatique et entre 57 et 76 ans chez un patient BPCO. L’ABPA est souvent découverte à l’occasion d’une exacerbation. Le diagnostic repose sur l’association de symptômes évocateurs, de marqueurs biologiques et de modifications radiologiques(4,5). Sur le plan clinique, la maladie se manifeste par une bronchite chronique, une bronchorrhée, une toux productive, des expectorations de moules bronchiques (très caractéristiques), parfois une hémoptysie et une dyspnée permanente. Plus rarement on peut observer des signes généraux comme un fébricule, une perte de poids, une fatigue(6). Un scanner thoracique de haute résolution peut montrer des impactions mucoïdes, des opacités en verre dépoli, des condensations alvéolaires ou des bronchectasies. Dans un tiers des cas, on ne retrouve pas d’anomalie au scanner(7). Les marqueurs biologiques sont essentiels pour le diagnostic(8-10). Deux sont obligatoires pour affirmer une ABPA ; ce sont une augmentation du taux d’IgE totales et une sensibilisation vis-à-vis d’A. fumigatus. Les seuils de sensibilité et de spécificité des taux d’IgE totales sont estimés à 417 KUI/l (voire 500 KUI/l) pour la sensibilité et à 1 000 KUI/l pour la spécificité. Concernant les taux d’IgE spécifiques, on admet que le seuil de sensibilité est de 0,35 KUA/l et celui de spécificité de 20 KUA/l. Une hyperéosinophilie et la présence d’IgG vis-à-vis d’A. fumigatus sont des critères mineurs, non indispensables au diagnostic d’ABPA. Les cultures d’expectoration ne contribuent pas au diagnostic l’ABPA, car A. fumigatus est omniprésent. Cet examen peut avoir un intérêt pour les tests de sensibilité aux médicaments.   OBJECTIFS ET AXES THÉRAPEUTIQUES   Le traitement a pour objectif de contrôler les symptômes et de diminuer le risque d’exacerbations. Il doit aussi prévenir les complications, telles que les bronchectasies, les exacerbations infectieuses, le trouble ventilatoire obstructif persistant, l’insuffisance respiratoire chronique. Enfin, il doit améliorer la qualité de vie et réduire le handicap respiratoire(11). Pour cela il convient de rechercher et d’éradiquer A. fumigatus de l’environnement du patient. L’expertise d’un conseiller médical en environnement intérieur peut être utile pour identifier et décontaminer les endroits où se cachent les moisissures. Le traitement d’attaque d’une exacerbation repose sur la corticothérapie orale avec un sevrage progressif. Elle diminue l’inflammation pulmonaire et l’éosinophilie(12). En dehors des poussées, les corticoïdes inhalés associés aux bêta2-mimétiques de longue action peuvent être utiles pour contrôler les symptômes et prévenir les exacerbations. Les antifongiques oraux, en réduisant la charge fongique, diminuent l’inflammation et participent à l’épargne cortisonique(13). L’amphotéricine B en nébulisations peut être proposée en traitement d’entretien(14,15). L’utilisation des anticorps monoclonaux pour lutter contre l’inflammation pulmonaire liée à la sensibilisation à A. fumigatus a été envisagée. Une étude de 2015 a montré une diminution des exacerbations après 4 mois de traitement par omalizumab (comparé à un placebo) chez des patients ABPA non contrôlés par la corticothérapie(16). Ce résultat a été confirmé dans une revue de la littérature de 2017(17). Dans ce contexte l’omalizumab (les anticorps monoclonaux anti-Th2) pourrait être réservé aux patients réfractaires au traitement ABPA, avec un asthme non contrôlé en dépit de la corticothérapie et chez ceux avec des effets II ou avec une CI aux glucocorticoïdes et aux antifongiques triazolés. Une évaluation à venir du mépolizumab, du dupilumab et du benralizumab devra montrer clairement quel est leur rôle dans ABPA.

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