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CONGRÈS

Publié le 06 mai 2020Lecture 5 min

Apnées du sommeil, identifier le phénotype pour mieux traiter

Denise CARO, Paris

Dans le monde, près d’un milliard d’adultes entre 30 et 69 ans souffrent d’un syndrome d’apnée-hypopnée du sommeil (SAHOS) avec au moins 5 événements par heure et ils sont 425 millions à faire plus de 15 pauses par heure. Ainsi selon le seuil diagnostique retenu, la prévalence de la maladie est proche de celle de l’HTA ou du diabète(1). Toutefois en dépit d’une grande hétérogénéité clinique, les recommandations de prise en charge restent relativement stéréotypées prenant en compte les symptômes classiques de la maladie, l’indice d’apnées-hypopnées (IAH) et partiellement le risque accidentel. Proposer une médecine personnalisée des SAHOS implique de mieux connaître les différents phénotypes de la maladie comme le montrent plusieurs publications récentes(2-4).

Les SAHOS peuvent être classés en fonction de différents critères : les facteurs de risque environnementaux (allergie, alcool, obésité, médicaments), la clinique (maladie cardiovasculaire, diabète, syndrome métabolique, âge, cancer, neurocognition, symptômes, sexe, polysomnographie), la physiopathologie (réponse des muscles respiratoires, anatomie, volume des poumons, conduits ventilatoires, stabilité du sommeil, excitation), la biologie (changements neuro-hormonaux, inflammation, déséquilibre fibrinolytique, stress oxydatif, dysfonction endothéliale), ou la génétique (pharmaco- génomique, épigénétique, ARM messager, ADN non codant)(5). Une première étape consiste à analyser les données des grandes cohortes de personnes atteintes de troubles respiratoires du sommeil pour identifier les principaux clusters de patients et leurs réponses aux traitements. La cohorte islandaise ISAC portant sur 822 patients avec un SAHOS modéré ou sévère a permis de classer les malades en trois groupes en fonction des symptômes dominants : insomnie (32,7 %) groupe plutôt féminin, comorbidités cardiovasculaires (24,7 %) et symptômes nocturnes et diurnes classiques du SAHOS (42,6 %)(6). Les clusters identifiés dans les cohortes françaises La cohorte sommeil des Pays de Loire a inclus 15 830 adultes entre 2007 et 2018 et a recueilli des données anthropomorphiques, socio-économiques, polysomnographiques, les co - morbidités, l’échelle de somnolence d’Epwor th, échelle de dépression QD2A, score qualité de vie SF36, bilan glucido-lipidique et biologie hépatique. Près de 6 000 patients avec un IAH > 15 ont été classés en cinq clusters : le C1 est celui des femmes avec des apnées et des symptômes d’insomnie et de dépression (14,2 %) ; les C2 et C3 présentent des apnées du sommeil typiques mais diffèrent par l’âge et les comorbidités (33,3 %) ; le C4 regroupe des patients plutôt jeunes et peu symptomatiques (32,0 %) et le C5 concerne les patients avec des comorbidités (20,5 %)(7). De même, les caractéristiques de 18 263 patients avec un IAH > 15, issus du registre de l’observatoire du sommeil de la fédération de pneumologie (OSEP), ont permis de distinguer six clusters : le premier regroupe les patients jeunes et symptomatiques (10 %) ; le second les patients âgés obèses (23 %) ; le troisième les patients avec des polypathologies et obèses (18,4 %) ; le quatrième les jeunes ronfleurs (14,8 %) ; le cinquième les somnolents obèses (19,2 %) ; le sixième les patients avec des polypathologies, obèses et symptomatiques (14,6 %)(8). Pour sa part, la cohorte Hypno- Laus portant sur 2 121 sujets âgés de 40 à 85 ans avec autant d’hommes que de femmes (dont les ¾ étaient ménopausées) a évalué les comorbidités associées aux SAHOS. Elle a montré que les hommes sont plus souvent diabétiques et les femmes plus souvent hypertendues, avec un syndrome métabolique et des symptômes dépressifs(9). La réponse au traitement  Les principaux phénotypes cliniques identifiés, il est intéressant de regarder s’ils répondent différemment aux traitements. Les dossiers de 3 090 patients de la cohorte des Pays de Loire, traités par pression positive continue (PPC) depuis 6 mois ont été analysés. Le critère d’efficacité thérapeutique est une observance de plus de 4 h par nuit et une amélioration du score Epworth et/ou QDV (vitalité). Ce critère est atteint par 40 % seulement des patients. Toutefois certains répondent mieux que d’autres : les SAHOS typiques ont le meilleur bénéfice de la PPC et les patients avec des comorbidités le moins bon(7). De même, dans la cohorte ISAC, les patients avec une symptomatologie typique de SAHOS tirent le meilleur bénéfice d’un traitement par PPC pendant 2 ans et les plus symptomatiques améliorent le mieux leur PA diastolique(10). La somnolence étant fréquemment associé au SAHOS, il im por - te de s’interroger la capacité de la PPC à supprimer ce symptôme. Selon les données de la cohorte OSEP, 13 % des patients traités gardent un score Epworth élevé. Les patients qui restent somnolents ont un score Epworth de départ plus élevé (p < 0,0001), plus de symptômes dépressifs (< 0,01), plus de fatigue (< 0,0001) et un état général de santé moins bon (< 0,001) ; cela concerne proportionnellement davantage de femmes que d’hommes (< 0,01)(11). À noter que le cluster des patients avec un risque cardiovasculaire augmenté sont les plus somnolents(12). Par ailleurs, plusieurs essais ont montré que la PPC est peu efficace pour réduire le risque cardiovasculaire chez les patients avec un SAHOS(13,14). Les informations des enregistrements polysomnographiques La cohorte HypnoLaus a analysé les phénotypes en fonctions des enregistrements polysomnographiques. Au total, 40,8 % des patients font plus de 20 apnées/heures en sommeil paradoxal (REM-AHI). L’augmentation des apnées en sommeil paradoxal est corrélée à un risque accru de syndrome métabolique, de diabète et d’HTA(15). Les enregistrements polysomnographiques de la cohorte Hypno- Laus ont également permis d’étudier les apnées positionnelles (POSA) : au moins 5 événements/ heure et deux fois plus sur le dos que dans une autre position. Certains patients font des apnées exclusivement sur le dos ePOSA. Chez les 40-85 ans, une personne sur deux fait des POSA et 26 % des ePOSA. Dans la population des SAHOS, 75 % font des POSA et 36 % des ePOSA. Un IAH et un IMC bas sont associés à une POSA et ePOSA chez l’homme. Chez la femme avant la ménopause, les POSA sont associés à un score d’Epworth > 10, après la ménopause ils sont associés à un IMC bas(16). Adapter la prise en charge  La meilleure compréhension des phénotypes de SAHOS permet d’adapter les propositions de prise en charge. Chez un patient obèse avec des comorbidités métaboliques, des recommandations de modifications du mode de vie et d’alimentation doivent être associées à la PPC pour agir sur le risque cardiovasculaire. De même, chez les patients SAHOS avec des troubles du sommeil, une thérapie cognitivo-comportementale peut être utile pour améliorer l’insomnie et l’observance de la PPC. La chirurgie ou des dispositifs alternatifs peuvent être proposés face à une anomalie anatomiques pharyngées. Enfin face à un problème de somnolence résiduelle et après avoir éliminé toute autre cause de somnolence, il sera bientôt possible de proposer l’une ou l’autre des deux molécules prochainement sur le marché le solriamfetol ou le pitolisant(17,18).   D’après la communication de F. Gagnadoux (Angers), CPLF 2020

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