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CONGRÈS

Publié le 30 mar 2020Lecture 5 min

Asthme sévère, les avancées récentes et à venir pour un meilleur contrôle

Denise CARO, Paris

Les progrès accomplis dans la compréhension de la physiopathologie de l’asthme ont permis de développer un nombre croissant de biothérapies. La multiplication de ces traitements actuellement ou prochainement disponibles modifie la prise en charge des patients asthmatiques. Ces évolutions majeures autorisent à être plus ambitieux mais impliquent aussi qu’on soit capable de cibler les patients susceptibles de bénéficier au mieux de tel ou tel traitement.

L'inflammation de type T2 met en jeu troi s médiateurs c lés (les interleukines IL-4, IL-5 et IL-13) et un certain nombre de cellules (les lymphocytes Th2, les cellules lymphoïdes innées 2 [ILC2], les lymphocytes B, les éosinophiles, les basophiles, les mastocytes, les cellules dendritiques et les macrophages M2). L’Il-4 active la transformation des lymphocytes T naïfs Th0 en les lymphocytes Th2. Elle favorise aussi le passage des lymphocytes B en cellules productrices d’IgE qui joue un rôle dans l’inflammation allergénique. L’I L-4, l ’I L-5 et l ’I L-13 sont essentielles au recrutement, à la migration et à la maturation des éosinophiles. Or, la présence d’éosinophiles dans les bronches active la réactivité bronchique et le remodelage. L’IL-13 est la cytokine du remodelage ; elle agit sur le muscle lisse bronchique, le mucus et la fibrose(1). L'avènement des biothérapies La compréhension de ces différentes voies de l’inflammation chez l’asthmatique a débouché sur le développement de plusieurs biothérapies. La première arrivée sur le marché indiquée dans l’asthme sévère non contrôlé a été l’omalizumab, un anti-IgE. En bloquant les IgE circulantes, on empêche la présentation de l’antigène et la dégranulation mastocytaire. Sont arrivés ensuite, un anti-IL-5 (le mépolizumab) et un anti-IL5R (le benralizumab). En bloquant l’IL-5 ou son récepteur, on agit directement sur les éosinophiles et donc sur leurs effets bronchiques. La 4e biothérapie, dont on devrait prochainement disposer, concerne un anti-IL-4R (le dupilumab). Or bloquer la chaîne alpha du récepteur de l’IL-4 revient à bloquer la voie de l’IL-4 mais aussi celle de l’IL-13 qui partage une part de ce récepteur(2). Ainsi les trois cytokines clés de l’inflammation T2 jouent un rôle essentiel mais différent et complémentaire dans la pathogénie de l ’as thme : l ’I L-5 impacte l’éosinophile, l’IL-4 et l’IL-13 le remodelage et l’atopie. De la même façon, les deux biomarqueurs les plus importants de l’inflammation T2 que sont l’éosinophilie sanguine et la frac tion expirée du NO (FeNO) ont des significations différentes et complémentaires : l’éosinophilie indique la prépondérance de la voie IL-5, alors de l’élévation de la FeNO est associée à l’activation des voies IL-4 et IL-13(3). Ces différences apparaissent clairement dans les AMM des biothérapies : une éosinophilie sanguine supérieure à 300 cellules/mm3 est associée à la prescription du mépolizumab et du benralizumab, alors que pour le dupilumab, l’éosinophilie doit être supérieure à 150 cellules/mm3 et/ou la FeNO supérieure à 20 ppb. L'évaluation de la réponse thérapeutique Dès lors, que peut-on attendre des biothérapies pour contrôler les asthmes sévères ? D’une façon générale, les différentes biothérapies se sont avérées efficaces sur l’ensemble des critères principaux et secondaires choisis dans les essais randomisés : la réduction des exacerbations et l’épargne corticoïde, l’amélioration du VEMS, le contrôle de l’asthme et la qualité de vie(4-7). On peut s’interroger sur la pertinence de ces critères pour refléter fidèlement l’ensemble des éléments de la réponse au traitement et sur la façon dont ils sont évalués en pratique. Par exemple, il peut être difficile d’estimer la consommation de médicaments (en particulier de CS) pour juger de la survenue d’exacerbations, plusieurs praticiens étant susceptibles de faire une prescription. De même, les scores ACT et ACQ sensés évaluer le contrôle de l’asthme ne donnent une indication que sur ce qui s’est passé les 4 dernières semaines et ne prennent pas en compte tous les paramètres de qualité de vie(8). Par ailleurs quel crédit accorder à la mesure du VEMS volontiers pratiquée pour évaluer l’asthme mais dont l’impact reste à évaluer. Il ne faut pas ignorer non plus que les objectifs prioritaires des patients peuvent diffèrer de ceux des médecins. Selon une étude 46 % des asthmatiques veulent réduire les exacerbations, 38 % veulent réduire le recours aux traitements de secours ; mais ceux qui veulent être moins limités dans leurs activités (du fait du bronchospasme ou des effets secondaires des traitements) sont plus nombreux (60 %), de même que ceux qui souhaitent réduire leurs symptômes (52 %)(9). En effet, l’asthme sévère est un véritable handicap. Ses répercussions sont lourdes. L’espérance de vie est diminuée de 20 % dans la population corticodépendante(10). Et 2/3 des patients avec un asthme sévère présentent des troubles psychologiques (anxiété ou dépression)(11). Le contrôle de l’asthme va désormais au-delà des exacerbations avec des objec tif s d’épargne cortisonique, de prévention du risque à long terme de dégradation de la fonction respiratoire et de prise en charge des comorbidités. Dès lors, comment l’ensemble des paramètres utiles à l’évaluation du bénéfice thérapeutique (contrôle des symptômes, exacerbations, fonction respiratoire, consommation de corticoïdes, qualité de vie, satisfaction des patients) sont-ils intégrés dans les études et en pratique quotidienne ? En réalité, ils semblent peu pris en compte dans les études qui donnent un résultat global ; par exemple : « réponses effectives » et « réponses non effectives »(12) ou « bonne réponse » dans les recommandations du GINA. Il va falloir progresser sur ce qu’est une bonne réponse et sur quels critères on décide de poursuivre un traitement ou de le modifier, à estimé C. Taillé (Paris).    En pratique Pour évaluer le bénéfice d’un traitement, il faut avoirfait une évaluation préthérapeutique rigoureuse avec des scores chiffrés de contrôle, une estimation des exacerbations et de la consommation annuelle de corticoïdes, une mesure de la fonction respiratoire et une évaluation de la qualité de vie et des besoins du patient. Bien qu’il n’y ait pas de recommandation à ce sujet, une première évaluation après 6 mois de traitement paraît raisonnable. Elle doit être globale et intégrer le ressenti du malade. Enfin il ne faut pas prendre de décision de changement de traitement dans la précipitation et toujours discuter de cette éventualité de façon collégiale.   D’après les communications de P. Berger (Pessac), C. Taillé (Paris) et A. Bourdin (Montpellier) lors d’un symposium présidé par P. Chanez (Marseille) et M. Russier (Orléans) et organisé par les laboratoires Sanofi-Genzyme, CPLF 2020

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