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Allergologie

Publié le 17 oct 2019Lecture 7 min

Les allergies aux équipements sportifs

Nadia RAISON-PEYRON, service de dermatologie, hôpital Saint-Éloi, CHU de Montpellier

En raison d’une pratique sportive de plus en plus importante, les allergies de contact aux accessoires sportifs sont de plus en plus fréquentes. La recherche de la performance qui caractérise le sport professionnel mais aussi la pratique du sport de loisirs, a conduit à l’utilisation massive de nouveaux matériaux dont le potentiel en termes de design et de propriétés d’usage est considérable. Les matériaux polymères, plastiques, composites et caoutchoucs sont très utilisés, mais leur fabrication complexe rend difficile l’identification du (des) allergène(s) en cause lors de l’exploration d’une allergie de contact à un de ces équipements.

Les principaux allergènes de contact Ce sont les caoutchoucs, les résines synthétiques, plus rarement les colorants textiles, les métaux et la colophane. Une très bonne revue de la littérature de 2007 fait le point sur les allergies de contact aux équipements sportifs(1). Les allergènes des caoutchoucs Ce sont surtout les accélérateurs de vulcanisation tels les thiurams, les dithiocarbamates, le mercaptobenzothiazole et sesdérivés, les thiourées. Ces dernières sont également utilisées pour leurs propriétés antioxydantes. Le chloroprène commercialisé sous le nom de Néoprène est fabriqué à partir du 2-chloro-1,3 butadiène avec l’ajout d’accélérateurs de vulcanisationcomme les thiourées. La diéthyl-thiourée est la plus souvent en cause dans les allergies de contact aux objets en Néoprène.Toutes ces substances peuvent être retrouvées dans les chaussures de sport, les vêtements et matériels pour sports aquatiques(combinaison et chaussons de plongée, de surf, de canoë et kayak, lunettes, masque, tuba,poignée de planche de surf, bonnet pour sport en eau vive, manchon de pagaie de canoë et kayak, gilet de ski nautique ou de wakeboard, sur-bottes et cagoule pour la navigation en haute mer),les bottes, les accessoires pour protéger les articulations tels les genouillères, épaulières et chevillières, les protège-tibias, ainsi que dans de nouveaux accessoires tels les brassards de sport pour téléphone. Dans la littérature, de multiples cas d’eczémas de contact allergiques à ces substances ont été rapportés : thiocarbamates de masques ou de combinaisons de plongée, thiourées dans des lunettes de piscine, les combinaisons de plongée, diéthylthiourée et mercapto-mix dans des protège-tibias, thiuram d’une bande élastique utilisée par une gymnaste(2-4). Plus récemment, une épidémie d’eczéma de contactallergique du dos des pieds dûs à des chaussures bateau en toile aété rapportée en Belgique. L’allergène responsable est un agent de vulcanisation, le sulfure de diméthylthiocarbamylbenzothiazole avec de probables réactions croisées avec le thiuram mix(5). Des antioxydants comme la N-Isopropyl-N-phényl-4-phénylènediamine (IPPD) ou la N,N’-Diphényl-1,4-paraphénylènediamine (DPPD) des caoutchoucs peuvent être en cause : eczéma du dos des pieds dû à des palmes en caoutchouc bleu avec des patch-tests positifs à la DPPD et à certains colorants azoïques,eczéma des paumes au contact de poignées de vélo avec des patch-tests positifs à l’IPPD. Des cas d’allergie de contact aux protège-tibias avec des patch-tests positifs à l’IPPD ont été rapportés chez deux jeunes footballeurs et à une genouillère chez un sportif pratiquant la moto. Les résines synthétiques Parmi les résines synthétiques, la résine para-tert-butylphénol formaldéhyde qui est présente dans la batterie standard européenne a été responsable d’eczémas de contact à des protège-tibias chez de jeunes footballeurs, à des genouillères chez une basketteuse professionnelle, à des vêtements pour sports aquatiques, à des chaussures de sport où elle est utilisée comme colle(6). La résine phénol formaldéhyde peut aussi être incriminée : un cas d’eczéma de contact à des lunettes de piscine a été rapporté.   Le patch-test au peroxyde de benzoyle était aussi positif(7). La résine urée formaldéhyde a été incriminée dans un eczéma de contact à des protège-tibias(8). Les colorants textiles sont plus rarement en cause. Des réactions croisées avec la DPPD de palmes en caoutchouc bleu ont été rapportées dans la littérature(9). Autres agents allergènes   • La colophane   Des cas d’eczéma de contact à des résines contenant de la colophane ont été rapportés chez des joueurs de boule(10). Cette résine était utilisée pour faciliter l’adhérence.Les joueurs de hand-ball peuvent aussi être concernés par ces allergies de contact.Il peut s’agir d’eczémas des mains ou d’eczéma aéroporté. Il faut tester la colophane mais aussi les colophanes modifiées si la colophane de la batterie standard est négative.   • Les métaux, les sels de chrome   En ce qui concerne les métaux,les sels de chrome utilisés pour tanner le cuir des chaussures et des gants en cuir, des bottes d’équitation peuvent donner des eczémas de contact. Le nickel peut être relargué à par-tir d’accessoires métalliques de vêtements ou de barres d’haltérophilie comme chez une jeune patiente de 21 ans pratiquant le CrossFit et qui présentait un eczéma de la partie du thorax et des faces antérieures  de cuisses(11).   • L’acétophénone azine   Récemment, un nouvel allergène,l’acétophénone azine, a été mis en cause dans des eczémas sévères dus à des protège-tibias ou des baskets dont la mousse est en copolymère de vinyle acétate (EVA). Le premier cas était celui d’un jeune footballeur de 13 ans qui a développé quelques jours après le port de protège-tibias neufs un eczéma à la face antérieure des deux jambes secondairement généralisé(12). Un nouvel aller-gène présent dans la mousse des protège-tibias a été identifié par chromatographie HPLC : l’acéto-phénone azine (AA). Les patch-tests étaient fortement positifs à la mousse des protège-tibias en EVA et à cette substance (négatifs chez 20 sujets témoins pour l’AA). Par la suite, 3 autres cas ont été rapportés : il s’agissait de 2 jeunes garçons et d’un jeune adulte(13,14). L’eczéma survenait après l’utilisation de protège-tibias (foot, hockey sur glace) et dans un cas après le port de baskets. Ils ont eu des poussée sultérieures en mettant des tongs ou des baskets. Tous ont eu une généralisation secondaire des lésions. Les patch tests étaient positifs à l’AA (testée le plus souvent à 0,1 % pet). L’AA était détectée dans toutes les mousses (taux variant de 8 à 69 μg/g de mousse) mais parfois à des taux beaucoup plus faibles (< 0,5 μg/g de mousse pour une paire de baskets). Nous ne savons pas pourquoi cette molécule est utilisée dans les mousses en EVA. S’agit-il d’un contaminant lors du processus de fabrication ? D’autres études sont nécessaires pour mieux connaître les sources d’exposition, le métabolisme de cette substance, les réactions croisées potentielles et la concentration optimale pour la réalisation des patch-tests. Le bilan allergologique La plupart des additifs des caoutchoucs se trouvent dans la batte-rie standard (mercapto-mix,mercaptobenzothiazole, thiuram-mix, IPPD) ainsi que la résine para-tertiaire-butylphénol formaldéhyde, la colophane, le nickel et le chrome.Les thiourées (diéthyl, dibutyl etdiphénylthiourée) qu’il convient de tester toutes, les réactions croisées étant loin d’être systématiques, ainsi que les carbamates sont présents dans la batterie caoutchoucs. Les autres résines formolées se trouvent dans la batterie plastiques-colles ainsi que le peroxyde de benzoyle, l’abitol et l’acide abiétique, tous deux dérivés de la colophane.L’acétophénone azine n’est pas commercialisée par les firmes de patch-tests ; de même, les colophanes modifiées et le sulfure de diméthylthiocarbamylbenzo-thiazole.Il ne faut pas oublier de tester des morceaux d’accessoires, humidifiés avec de l’eau et de taille suffisamment importante, ces tests pouvant être réalisés en semi-ouvert.   Si on réalise également des tests avec des raclures humidifiées dans de l’acétone ou de l’éthanol, il est conseillé de faire des témoins (tester le véhicule seul) en raison de leur caractère potentiellement irritant. En pratique, il arrive relativement souvent que les tests cutanés avec les morceaux d’accessoires suspects soient positifs alors que toutes les batteries complémentaires que nous testons en plus de la batterie standard européennes ont négatives (plastiques-colles,textiles vestimentaires et caoutchoucs).   Les dermites d'irritation Par ailleurs, à côté des eczémas de contact allergiques, il ne faut pas oublier les dermites d’irritation qui sont bien plus fréquentes chez les sportifs. En effet, le contact prolongé avec la peau, la transpiration, le frottement de la peau avec des surfaces parfois abrasives favorisent ce type de dermatose(1). Conclusion En l’absence d’informations précises sur les substances utilisées pour la fabrication des accessoires sportifs, il est souvent difficile de donner des alternatives sûres aux patients ayant développé une allergie de contact à une de ces substances. • Par ailleurs, l’identification précise de l’allergène en cause est parfois impossible. • En pratique, les patients essaient souvent par eux-mêmes différents modèles ou marques afin de voir ceux qu’ils tolèrent.  

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