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Allergie alimentaire

Publié le 20 aoû 2012Lecture 8 min

Exploration de l’allergie alimentaire : ce qui est possible en pratique de ville

C. QUÉQUET, Amiens
Actuellement, en europe, la prévalence de l’allergie alimentaire en pédiatrie se situe aux alentours de 4,7 % alors que chez l’adulte elle concerne 3,2 %. Cette pathologie, la plupart du temps de mécanisme IgE-dépendant, peut s’exprimer cliniquement de manière variable selon l’âge. Son diagnostic et l’identification du ou des aliments responsables sont indispensables pour une meilleure gestion de la prise en charge. Depuis quelques années, l’allergologie moléculaire représente une aide précieuse dans l’arsenal diagnostique mis à la disposition des allergologues libéraux de ville, certains tests, comme le test de provocation orale (TPO), restant réservés à la pratique hospitalière.
Illustration/figure 1. : Prick-tests positifs aux crustacés et à l’huître (adulte).   Des tableaux cliniques variables L’interrogatoire, étape indispensable à toute exploration d’une allergie, qu’elle soit respiratoire ou alimentaire, doit comporter : la recherche d’un terrain atopique, la chronologie des événements, l’énumération des aliments ingérés suspectés, les symptômes cliniques observés et leur délai d’apparition. Le mécanisme immédiat IgE-dépendant est le plus souvent mis en cause avec des signes cliniques pouvant atteindre l’appareil cutané (urticaire, poussée aiguë d’eczéma atopique), muqueux (oedème), respiratoire (asthme), pouvant aller jusqu’au choc anaphylactique. Les mécanismes retardés sont plutôt d’expression cutanée ou digestive. La prise d’aspirine, de bêtabloquants, d’alcool, constitue des facteurs aggravants, d’autres peuvent représenter un facteur déclenchant comme l’effort, en particulier dans le cadre de l’anaphylaxie à l’effort rencontré la plupart du temps avec l’allergie au blé.   Les tests cutanés Les prick-tests Le diagnostic de l’allergie alimentaire et l’identification de l’allergène responsable reposent sur la pratique de tests cutanés en prick dans le cadre d’un mécanisme IgE-dépendant. La qualité de certains extraits commerciaux et depuis 2009, la disparition d’un bon nombre d’entre eux, laissent une large place à la technique du « prick-in-prick » avec des aliments natifs choisis en fonction de l’interrogatoire. Leur positivité devra toujours être corrélée à l’histoire clinique. Cette technique consiste, à l’aide d’un Stallerpoint® ou d’un ALK Lancet ®, à piquer la peau à travers l’aliment utilisé, de préférence frais. Figure 2. Tests cutanés à l’oeuf (JO : jaune d’oeuf ; BO : blanc d’oeuf) chez l’enfant. D’un point de vue diagnostique, le test de provocation orale peut devenir inutile lorsque la papule du prick à l’extrait commercial d’oeuf est supérieure ou égale à 5 mm avant l’âge de 2 ans et à 7 mm chez l’enfant plus âgé. Il en est de même pour l’arachide, si la papule a une taille supérieure ou égale à 4 mm avant 2 ans et 8 mm au-delà. Pour les prick-tests aux aliments natifs, la papule supérieure ou égale à 15 mm dispense du test de provocation orale diagnostique. Le TPO gardera toutefois sa valeur pour confirmer une guérison clinique, la recherche du seuil de réactivité pour pouvoir adapter un régime d’éviction. Le test de provocation orale (TPO) reste l’étalon or du diagnostic d’allergie alimentaire. Non dénué de risque, il se pratique uniquement en milieu hospitalier avec une équipe entraînée. Certaines contre-indications sont à éviter : un âge inférieur à 6 mois, une pathologie chronique en poussée, une instabilité ou une exacerbation d’un asthme préexistant, une anaphylaxie prouvée à un aliment avec des tests allergiques concordant et le consentement non obtenu du patient concerné.   Les atopy-patch-tests Un aliment natif liquide est déposé sur un petit disque en buvard dans la cupule. Ces tests doivent toujours être accompagnés de deux témoins négatifs : un avec de la vaseline et l’autre avec une cupule seule. La lecture des tests est réalisée selon les critères internationaux établis par l’ETFAD (European Task Forceon Atopic Dermatitis). Leur interprétation en tant que diagnostic positif demande à être affinée et validée par des études complémentaires. Conditions de réalisation optimum des atopy-patch-tests dans le cadre d’un bilan d’allergie alimentaire de mécanisme retardé : • La prise de corticoïdes oraux, de ciclosporine ou de tacrolimus oral est contre-indiquée. • L’arrêt des antihistaminiques doit se faire au moins 72 heures avant la pose des patchs, délai à adapter en fonction de la molécule utilisée. • Il faut éviter toute période de poussée aiguë d’eczéma et l’exposition préalable au soleil ou à des séances de photothérapie.   L’allergologie moléculaire : une arme diagnostiQUE devenue indispensable Les dosages d’IgE spécifiques classiques Auparavant, le dosage des IgE spécifiques trouvait son indication dans l’impossibilité de réaliser des tests cutanés pour différentes raisons (prise médicamenteuse, grossesse, etc. ou en cas de difficulté de lecture avec la présence d’un dermographisme). L’arrivée des dosages d’IgE spécifiques d’allergènes recombinants amène un renouveau dans leur indication, tout en gardant les précautions de prescription régies par l’arrêté du 5 novembre 2003 paru au Journal Officiel du 28 novembre 2003, modifié par décision du 3 décembre 2009 paru au Journal Officiel le 19 décembre 2009 (tableau 1). L’arrêté du 19 décembre 2010 paru au Journal Officiel du 11 janvier 2011 applicable depuis le 11 février 2011, pour sa part, concerne la réévaluation à la baisse de la cotation de certains actes de biologie. Pour exemple : le test dépistage trophallergène a vu sa cotation passée de B55 à B51. Il en est de même pour le dosage des IgE spécifiques trophallergènes entre autres.   Les IgE spécifiques des allergènes recombinants Contrairement aux extraits allergéniques obtenus à partir de source naturelle hétérogène constituée de molécules allergéniques et non allergéniques, les allergènes recombinants correspondent à une variante moléculaire précise reproductible à volonté. Ces protéines sont produites par génie génétique à partir de l’allergène naturel. Différentes familles ont été constituées d’allergènes thermosensibles ou thermorésistants, stables ou non à la digestion (tableau 2).   La dénomination de l’allergène recombinant répond à la nomenclature adoptée par l’OMS et l’Union internationale des sociétés d’immunologie (IUIS) en 1986. Il consiste à associer les trois premières lettres du genre (ara pour arachis) suivi de la première lettre de l’espèce (h pour hypogeae) puis un chiffre correspondant à son ordre de découverte (pour exemple, dès 1991, ara h1 est le premier allergène identifié pour l’arachide). Le r précédant cette dénomination exprime la nature recombinante de l’allergène cité. La différence entre un allergène majeur et un allergène mineur dans sa définition réside dans le taux de sensibilisation supérieur ou inférieur à 50 % chez les allergiques concernés à l’extrait global. Leur intérêt diagnostique réside dans l’identification de molécules allergéniques identiques, par exemple dans l’interprétation plus pointue des réactions croisées pneumallergènes/trophallergènes ou trophallergènes entre eux, des polysensibilisations avec différenciation entre allergie croisée ou cosensibilisation et l’établissement d’une corrélation plus fine entre les résultats cutanés, biologiques et la symptomatologie clinique. En conclusion, en pratique quotidienne de ville : • L’allergologie moléculaire constitue désormais un élément indispensable au diagnostic, en particulier dans l’allergie alimentaire. Elle permet parfois dans certaines indications de ne pas recourir au TPO diagnostique et ouvre de nouvelles voies dans la prise en charge de l’allergie concernée. La pratique des prick-tests a été modifiée depuis 2009 par la disparition de certains extraits commerciaux et les prick-inprick- tests doivent être privilégiés. Quant aux atopy-patch-tests, ils peuvent apporter une aide dans certaines indications, mais leur interprétation est encore rendue trop difficile pour pouvoir affirmer avec certitude leur utilité. Des études complémentaires sont à envisager pour les valider définitivement. • Le test de provocation orale reste toujours un examen à pratiquer en milieu hospitalier. Le cas particulier de l’anaphylaxie à l’effort reste plus difficilement gérable en ville du fait des circonstances particulières de déclenchement. Grâce à de nouvelles approches diagnostiques, le praticien allergologue de ville est plus à même désormais de gérer une grande partie des allergies alimentaires. Une collaboration étroite avec l’allergologue hospitalier est indispensable et permettra de renforcer la pratique de tests de provocation orale. • Dans le cadre d’une exploration allergologique, le praticien doit toujours avoir à sa disposition une trousse d’urgences avec corticoïdes, antihistaminiques, adrénaline, possibilité d’un accès veineux et O2. Les réactions systémiques suite aux prick-in-prick-tests aux aliments natifs sont extrêmement rares (< 1 %) et pour les atopy-patch-tests (aux alentours de 7,9 %).

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