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Otologie

Publié le 28 avr 2023Lecture 5 min

Les Assises Face et Cou - Les otomycoses

Hannah DAOUDI - D’après la communication de P. Franco

Les otomycoses sont des infections fongiques intéressant la peau du conduit auditif externe. Elles sont en recrudescence et sont souvent favorisées par une pathologie dermatologique sous-jacente. Elles représentent 5 à 30 % des otites externes. L’otomycose est le plus souvent unilatérale (dans 95 % des cas) et d’évolution bénigne. Parfois, l’infection peut être agressive et évoluer vers l’otite externe nécrosante fongique. Une co-infection bactérienne est possible.

Sur le plan anatomique, il s’agit d’une zone anatomique étroite dont l’architecture et la composition de la peau sont différentes entre la peau superficielle, relativement épaisse avec du cartilage et la peau fine du conduit auditif externe posée sur l’os dans sa partie la plus profonde au contact du tympan. Cette peau doit être bien ventilée. L’équilibre de la flore locale peut être perturbé par l’humidité, la disparition du cérumen, les traumatismes locaux (grattage, aides auditives), certaines maladies dermatologiques et le diabète. Sur le plan histologique, l’épiderme est de type épithélium pavimenteux stratifié kératinisé avec la capacité de produire de la kératine dans certaines conditions et également une possibilité de migration. Sa particularité est de contenir des follicules pilosébacés et des glandes cérumineuses, et ce, uniquement dans sa moitié externe. La flore commensale microbienne du conduit auditif externe est assez semblable au reste de la flore cutanée, mais elle est limitée par la présence du cérumen. Les germes les plus fréquents ou microbiotes résidents sont représentés par les staphylocoques à coagulase négative, les bacilles Gram+ aéro et anaérobie. Le microbiote transitoire est repré- senté par le staphylocoque doré avec des germes sporadiques, Escherichia coli, protéus, Pseudomonas aeruginosa. La flore commensale fongique est représentée par le microbiote fongique (Micromycète), des moisissures (Aspergillus, pénicillium), des levuriformes (Candida parapsilosis, Malassezia). Les otites externes mycotiques simples à tympan fermé sont caractérisées par un prurit, une douleur à la mobilisation du pavillon et la pression du tragus, une otalgie, une otorrhée, une hypoacousie. Les patients sont apyrétiques. Sur le plan otoscopique, on retrouve des sécrétions blanchâtres, qui sont épaisses et abondantes avec un aspect de coton en cas de Candida albicans, ou bien avec des filaments mycéliens et parfois des nécroses tissulaires, en cas d’Aspergillus. Sur le plan thérapeutique, il y a peu de molécules locales antifongiques. Un seul antifongique disponible est l’Auricularum, qui sera plus efficace sur le Candida que sur l’Aspergillus. Il peut être utilisé sur un tympan ouvert. Très peu d’anti-infectieux sont disponibles en gouttes lorsque le tympan est ouvert, Ciloxadex®, Oflocet®, Otofa®. On peut également utiliser des antiseptiques locaux : Bétadine® diluée, eau oxygénée. Il faut réaliser des aspirations d’oreille répétées. En cas d’échec d’un traitement local de première intention, il faudra effectuer des prélèvements à visée bactériologique et mycologique. Le délai de renouvellement de la peau du conduit auditif externe et de trois semaines et il faut donc traiter localement pendant cette durée. D’autres antimycosiques peuvent être utilisés, notamment les azolés. Ils sont efficaces le Candida albicans et moins sur l’Aspergillus. Le Pevaryl® n’a pas d’AMM dans le conduit auditif externe. Il faut l’utiliser sur méchage lorsque le tympan est fermé. Le Cotrimazole® ou Mycohydralin® constitue le traitement de choix dans beaucoup de pays, mais il est disponible uniquement en crème en France. Certaines otites externes à tympan fermé nous posent problème. Il faut rétablir des conditions locales adéquates, c’est-à-dire éviter l’eau dans le conduit, traiter l’eczéma (Dexafree®, Diprosone®, Locoïd®), suspendre le port des prothèses auditives, arrêter grattage et les microtraumatismes, sécher les conduits au sèche-cheveux (air froid). Les prélèvements sont faits quand il s’agit d’une forme inflammatoire sévère, il y a un terrain diabétique ou immunodéprimées, il s’agit d’une infection postopératoire, il y a un échec du traitement local, il s’agit d’une otite mycotique à tympan ouvert. On utilisera deux écouvillons fins avec milieu de transport et un écouvillon sec qu’il faudra transmettre dans un délai < 2 heures au laboratoire et si possible à 5 °C. En cas d’otite externe mycotique à tympan ouvert : soit le tympan était ouvert avant l’infection, soit le tympan s’est perforé par action du clou mycotique (souvent Aspergillus). La contamination mycotique de l’oreille moyenne sera moins accessible aux traitements locaux, plus chronique et qui peut être favorisée par un cholestéatome sous-jacent, un diabète, une immunosuppression. Il faut diagnostiquer l’extension de l’infection fongique à l’oreille moyenne et à l’os avec une imagerie (TDM, IRM, TEP-scanner). À l’IRM, en cas d’atteinte profonde, la muqueuse prend le contraste en IRM. les lyses osseuses caractérisent une infection agressive, les plages d’ostéocondensation correspondent à une infection ancienne. Il faut éliminer une lésion tumorale et ne pas hésiter à biopsier au moindre doute. Attention aux infections du rocher à Aspergillus. L’atteinte peut être non invasive, localisée, n’envahissant pas les tissus et répond au traitement chirurgical simple (mastoïdectomie) ; ou invasive, avec extension osseuse chez des patients immunocompétents ; ou fulminante avec invasion des tissus et des micro-vaisseaux chez les patients immunodéprimés. Le traitement chirurgical est réservé aux formes invasives ou résistantes au traitement médical et en cas d’absence de germe et d’antifongigramme. L’objectif est d’effectuer des prélèvements profonds, de nettoyer la muqueuse infectée et l’os lytique, de reventiler la mastoïde. Sur le plan médical, il faut continuer les soins locaux de nettoyage avec assèchement du conduit auditif externe. Un traitement antifongique par voie générale peut être entrepris après des prélèvements profonds, après avis des infectiologues. Une molécule peut être utilisée en première intention, le Vfend® ou Voriconazole® à la dose de 6 mg/kg/12 heures en dose de charge pendant 24 heures puis 4 mg/kg/12 heures Les effets secondaires ne sont pas négligeables : allongement du QT, toxicité hépatique, phototoxicité. La surveillance hépatique doit être réalisée chaque semaine et la fonction rénale au début.   CONCLUSION Les otites externes mycotiques à Candida posent peu de problèmes. En revanche, l’Aspergillus est plus problématique avec peu de traitements locaux disponibles. Il faudra toujours traiter la maladie cutanée ou muqueuse sous-jacente et avoir une documentation microbiologique et ne pas hésiter à demander une imagerie et collaborer avec l’infectiologue et le biologiste. L’ORL et le biologiste mènent l’enquête, l’infectiologue arrête le coupable.

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