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Cancérologie

Publié le 05 avr 2023Lecture 4 min

Radiomique en oncologie thoracique : promesses tenues ?

Maïa GOUFFRANT - D’après la communication de M.-P. Revel (hôpital Cochin, Paris) CPLF 2023

Comme toutes les nouvelles technologies, la radiomique a suscité beaucoup d’attentes, sans doute trop, et les résultats ne sont pas toujours au rendez-vous. Néanmoins, il reste certain qu’on peut retirer bien des informations « invisibles » à l’oeil humain qui apporteront une aide dans la prise en charge des cancers.

La première publication concernant la radiomique date de 2012. La radiomique se définit par l’extraction à partir de l’imagerie d’un grand nombre de caractéristiques imperceptibles à l’oeil humain qui seront corrélées à des données cliniques ou biologiques. En oncologie thoracique, on espérait des applications multiples que ce soit pour la prédiction de malignité, de l’évolution, de la réponse thérapeutique, etc., avec pour chacune une « signature » radiomique permettant de classer par exemple en répondeur ou non, malin ou non, etc.   LES BASES DE LA RADIOMIQUE La radiomique repose sur un certain nombre d’hypothèses. Elle présuppose que l’image est une expression phénotypique de la maladie, que l’image renferme plus d’information que celles qu’on voit à l’œil nu (les « descripteurs » ou features), et que l’utilisation de la masse de données stockées permet de générer des biomarqueurs ou des signatures en imagerie. Mais comme on ne sait pas quel est le descripteur le plus performant, on teste tout sans formuler d’hypothèses au départ. Deux méthodes sont utilisées, le « machine learning classique » qui nécessite l’intervention humaine pour l’extraction et la sélection des descripteurs et le deep learning plus récent. Le machine learning classique passe par le prétraitement des images, la segmentation de la zone d’intérêt, l’extraction des descripteurs (forme, données d’histogramme, texture, etc.). On peut en extraire jusqu’à plusieurs milliers dans une même image, aussi les descripteurs non reproductibles ou redondants sont-ils éliminés pour en garder au maximum une quinzaine et construire un modèle. Avec le deep learning, le modèle va sélectionner de manière itérative la meilleure combinaison de descripteurs. Dans les deux cas, le modèle doit impérativement être validé sur des données qui n’ont pas servi à sa création.   LES APPLICATIONS EN ONCOLOGIE THORACIQUE Une étude menée chez 286 patients a permis de prédire la malignité avec une AUC de 0,80 si on tient compte à la fois des descripteurs intra et péri-nodulaires(1). Résultats similaires pour prédire la malignité d’un nodule avec une sensibilité de 89 % et une spécificité de 74 % ; les descripteurs intégraient l’irrégularité et l’hétérogénéité ce qui est cohérent avec les critères radiologiques classiques(2). Autre intérêt, la radiomique permet mieux que l’imagerie classique d’évaluer le temps de doublement volumique. En revanche, en ce qui concerne le caractère invasif ou non d’un adénocarcinome, les différentes études menées reposaient sur des signatures différentes et finalement ne se sont pas révélées plus prédictives que l’évaluation classique de la taille de la partie solide de la tumeur. En ce qui concerne la réponse à l’immunothérapie, les descripteurs ont permis de distinguer 2 catégories de patients selon l’importance de l’infiltrat CD8 avec une meilleure survie si le score CD8 était élevé (AUC = 0,67)(3). Les résultats sont plus mitigés dans un essai sur la prédiction de la réponse des CNPC aux anti-PD1 : l’AUC est de 0,83 pour les métastases pulmonaires, de 0,76 pour les métastases ganglionnaires, mais cela est non significatif pour les lésions primitives ou les métastases hépatiques(4). Pour la prédiction de la survie globale à 2 ans après radiothérapie ou chirurgie, l’approche en deep learning était plus performante que le machine learning(5).   LES LIMITES DE LA RADIOMIQUE La qualité des études reste le point faible de la radiomique. Ainsi, pour 77 articles publiés jusqu’en 2018 dans des journaux à impact factor supérieur à 7, le score de qualité moyen est de 26 %. On pointe plusieurs écueils : les images qui servent à l’acquisition ne sont pas standardisées, et lorsqu’on extrait des données, « plus on cherche plus on trouve » des corrélations qui parfois n’ont aucun sens et ne sont pas généralisables ; enfin, la validation externe manque souvent. La radiomique n’a peut-être pas tenu ses promesses, mais les attentes étaient certainement démesurées. Il est indispensable de revoir les points litigieux, et en particulier la reproductibilité pourrait être améliorée grâce à l’intelligence artificielle(6).

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