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Dermatite atopique

Publié le 04 juil 2022Lecture 6 min

La place de l’allergologue dans la prise en charge de la dermatite atopique

Denise CARO, Boulogne-Billancourt

Depuis la publication des recommandations européennes sur la dermatite atopique en 2020(1), une actualité thérapeutique riche est intervenue, avec l’arrivée de nouveaux traitements innovants et l’élargissement aux allergologues de la prescription de certains médicaments hospitaliers.

La prévalence de la dermatite atopique dans le monde est estimée à 5 % chez l’adulte et à 10 à 15 % chez l’enfant, avec des disparités selon les pays. Son diagnostic est le plus souvent facile, associant des lésions d’eczéma, un prurit et une xérose cutanée. La topographie des lésions varie en fonction de l’âge. D’évolution chronique et fréquemment associée à des comorbidités atopiques (rhino-conjonctivite, asthme et allergie alimentaire)(2), elle affecte durement la qualité de vie des patients. Les activités au quotidien et la vie professionnelle sont les plus impactées, mais il existe également un retentissement de la vie intime, familiale, sociale et mentale(3). Le parcours de soins du patient atteint de dermatite atopique est complexe, faisant intervenir des praticiens de différentes disciplines en fonction des comorbidités associées. Il peut s ’en suivre un nomadisme médical avec un retard de diagnostic et une errance thérapeutique. La situation tend à s’améliorer avec la publication de recommandations claires et l’accès des allergologues à la prescription de certaines thérapies jusqu’alors réservées aux dermatologues ou aux pédiatres. L’ESSENTIEL DES RECOMMANDATIONS EUROPÉENNES En 2020, la task force de l’ETFAD et EADV sur l’eczéma a publié un position paper sur le diagnostic et le traitement de la dermatite atopique chez l’adulte et chez l’enfant(1). Les experts y insistent sur l’importance des scores d’évaluation pour déterminer la stratégie thérapeutique(1). Des mesures générales s’appliquent à toutes les DA quel le qu’en soit la gravité : éducation thérapeutique, application quotidienne d’émollient pendant et en dehors des poussées, éviction des allergènes (si tests allergologiques positifs). Outre ces mesures générales, la stratégie thérapeutique est fondée sur la sévérité de la DA évaluée à l’aide des scores disponibles. En présence d’une forme légère (SCORAD < 25) ou d’un eczéma transitoire, les experts recommandent l’application d’un dermocorticoïde (DC) de classe II ou d’un inhibiteur de la calcineurine topique (ICT) (tacrolimus topique). Une DA modérée (SCORAD 25-50) ou un eczéma récurrent, relève de : l’application quotidienne d’un DC de classe II ou III et/ou d’ICT, suivi d’un traitement proactif DC et/ou tacrolimus (1 à 2 fois par semaine) sur les zones habituellement atteintes pour prévenir les récidives ; un wet wrapping (bandages humides avec émollient et DC puis recouvert d’un bandage sec laissé en place pendant plusieurs heures) efficace rapidement sur le prurit ; ou une photothérapie (UVB TL01 ou UVA1). Face à une DA sévère (SCORAD > 50) ou d’un eczéma persistant, une hospitalisation courte est proposée pour s’assurer que le traitement est optimal, pour tenter un wet wrapping et pour initier un traitement systémique en cas d’échec des mesures précédentes. QUEL TRAITEMENT SYSTÉMIQUE ? En 2020, les traitements systémiques disponibles étaient les suivants : la ciclosporine en cure courte, le dupilumab, les corticoïdes oraux en cure courte, la PUVA-thérapie et plusieurs autres médicaments utilisés mais n’ayant pas d’AMM dans la DA (dont le méthotrexate). Depuis ces recommandations, des biothérapies ou anti-JAK ont obtenu une AMM dans la DA ou devraient l’obtenir prochainement. Actuellement en Europe, deux biothérapies sont approuvées dans cette indication — le dupilumab (anti-IL4R-alpha) et du tralokinumab (anti-IL13) —, deux sont en cours d’évaluation avec des résultats prometteurs — le lébrikizumab (anti-IL13) et le némolizumab (anti-IL31R) (intéressant sur le prurit). Trois anti-JAK — le baricitinib (JAK1/2 inhibitor), l’upadacitinib (JAK1 inhibitor) et l’abrocitinib (JAK1 inhibitor), ont l’AMM DA. En France, seuls le dupilumab et le baricitinib sont commercialisés dans la DA, les autres sont en attente de remboursement. LE DUPILUMAB EN PRATIQUE Le dupilumab est indiqué dans la DA sévère ou modérée de l’adulte nécessitant un traitement systémique du fait d’un échec ou une intolérance ou une contre-indication à la ciclosporine. Dans la DA de l’adolescent (12 ans et plus) et de l’enfant (6-11 ans), le dupilumab est indiqué lorsqu’un traitement systémique est nécessaire. Dans les essais de phase 3 chez l’adulte, 50 % des patients trait é s par dupilumab (sans DC associés) et 75 % de ceux sous dupilumab et DC, ont atteint l’objectif principal (EASI-75) à 16 semaines. Parmi les effets secondaires observés, il y a eu : des conjonctivites, des céphalées, quelques cas de réactivation herpétique et des réactions au site d’ injection. Les bons résultats du dupilumab dans les essais de phase 3 ont été confirmés en vie réelle(5,6). La gestion de ces quelques effets indésirables est assez simple. L’application systématique de larmes artificielles et de tacrolimus topique sur les paupières règle la plupart des conjonctivites légères ou modérées associées au dupilumab. En cas d’atteinte plus sévère, l’avis d’un ophtalmologue est souhaitable. Des antécédents de blépharo-conjonctivite n’exposent pas à un sur-risque de conjonctivite sous dupilumab (au contraire)(7). L’apparition d’un érythème cervico-facial sous dupilumab ce peut être due à : un eczéma de contact, un syndrome de sevrage des DC, une dermite périorale à demodex, une dermite séborrhéique à Malassezia. Un traitement approprié règle généralement le problème. De très rares formes sévères conduisent à l’arrêt de la biothérapie(8). En pratique, la prescription du dupilumab est initiée par un dermatologue ou un allergologue à l’hôpital ; entre deux visites à l’hôpital, le renouvellement du dupilumab peut se faire en ville par ces mêmes spécialistes. En effet, l’ANSM a accordé aux allergologues le droit de prescrire certaines biothérapies au même titre que les autres spécialistes concernés. La posologie adulte est de 600 mg en sous-cutané puis de 300 mg sc toutes les 2 semaines. Il n’y a pas de bilan préthérapeutique obligatoire. On peut demander une NFS et si besoin une consultation ophtalmologique. Il faut vérifier que le patient est à jour de ses vaccinations. LE BARICITINIB RÉSERVÉ AUX DERMATOLOGUES Seul le baricitinib (anti-JAK1/JAK2) est disponible en France avec l’indication DA. Dans les essais de phase 3, à 16 semaines, entre 20 et 25 % des patients ont atteint l’objectif EASI-75 dans le groupe baricitinib sans DC (vs 6 à 9 % pour le placebo) et 50 % pour le baricitinib avec DC(9,10). Les scores de prurit ont significativement été améliorés par le traitement qui agit très rapidement sur ce symptôme. La majorité des effets indésirables ont été peu sévères : rhino-pharyngites, céphalées, augmentation CPK, diarrhée, réactivation de l’herpès, folliculite du visage. Aucun cas d’événements cardiovasculaires majeurs, de thrombo-embolie ou de cancer n’a été signalé dans ces études. Toutefois en raison de la survenue de quelques cas de ces événements graves avec des anti-JAK (tofacitinib) dans des études en rhumatologie, ces derniers font actuellement l’objet d’une réévaluation européenne. Le baricitinib est contre-indiqué pendant la grossesse et l’allaitement. Sa prescription doit être accompagnée d’une contraception efficace. Il l’est également en cas de cancer récent (moins de 5 ans). Sa prescription est hospitalière (par le dermatologue). La dose initiale recommandée est de 4 mg/j (2 mg pour > 75 ans). Le bilan préthérapeutique comprend : une NFS, un bilan hépatique et lipidique, une évaluation de la fonction rénale et un bilan infectieux. Le baricitinib doit être arrêté en cas d’infection, de néoplasie ou d’événement cardiovasculaire(10).

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