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BPCO

Publié le 25 nov 2023Lecture 7 min

Les nouvelles propositions de GOLD sur la BPCO : focus sur les exacerbations

Denise CARO, d’après la communication du Dr Antonio Anzueto

Le groupe de travail GOLD (Global Initiative on Obstructive Lung Disease) vient de réactualiser ses préconisations pour la prise en charge des patients BPCO. Cette révision de 2023, la 5e, comporte des changements importants dans la classification des patients et dans leur traitement.

Dès 2001, GOLD proposait de classer les patients atteints de BPCO en fonction du niveau d’altération de leur fonction pulmonaire. Le stade 1 dit léger correspondait à une FEV1 supérieure à 80 %, le stade 2 qualifié de modéré à une FEV1 comprise entre 50 et 80 %, le stade 3 sévère à une FEV1 comprise entre 30 et 50 % et le stade 4 dit très sévère à une FEV1 inférieure à 30 %(1). En 2015, l’évaluation de la sévérité en fonction de l’atteinte de la fonction pulmonaire a paru insuffisante et le rapport GOLD a préféré classer les patients en fonction de la sévérité des symptômes (essentiellement la dyspnée) et de la fréquence et la sévérité des exacerbations aiguës : dyspnée légère (mMRC 0-1) groupe A, dyspnée importante (mMRC ≥ 2) groupe B, 0 ou 1 exacerbation dans l’année groupe C et au moins 2 exacerbations ou 1 exacerbation ayant entrainé une hospitalisation dans l’année groupe D(2). Depuis cette classification, plusieurs études ont montré le manque de pertinence du groupe C, d’une part, car il rassemble un assez faible nombre de patients (7,8 % vs 33,6 % pour A, 20,5 % pour B et 38 % pour D)(3) et, d’autre part, parce qu’il a un meilleur pronostic que les patients du groupe B(4).   LES EXACERBATIONS PRIMENT SUR LES SYMPTÔMES   En effet, la fréquence et la sévérité d’exacerbations comptent davantage que l’intensité des symptômes pour le pronostic de la maladie. Chaque nouvelle exacerbation réduit le délai de survenue de la suivante et augmente sa gravité. Dans le mois qui suit une exacerbation modérée le nombre d’événements cardiovasculaires augmente de 22 % et ce chiffre atteint 85 % après une exacerbation sévère(5). Environ 10 % des patients hospitalisés pour exacerbation décèdent à l’hôpital et la moitié décéderont dans les 5 ans(6). Les principaux facteurs de risque de mortalité ou de réadmission après une hospitalisation pour exacerbation sont : l’âge, une fonction pulmonaire très altérée (FEV1 < 30 %), un diabète de type 2, un cancer ou une insuffisance rénale à l’admission(7). Ainsi dans son dernier rapport, GOLD insiste sur l’importance d’identifier les phénotypes de patients BPCO exacerbateurs. Ces derniers présentent des taux élevés de CRP, de fibrinogène et d’IL-6, une susceptibilité aux infections virales, une colonisation bactérienne plus importante ; leur fonction pulmonaire décline rapidement ; ils ont davantage de comorbidités cardiovasculaires et neuropsychiques (dépression, troubles cognitifs) ; leur taux d’hospitalisations et de mortalité est élevé. La moindre importance du groupe de patients très symptomatiques mais non exacerbateurs ainsi que la gravité des exacerbations ont conduit les experts de GOLD à ne garder qu’un groupe de patients exacerbateurs étiqueté E, tout en conservant les 2 niveaux de symptômes cliniques A et B(8).   L’ÉVOLUTION DES STRATÉGIES THÉRAPEUTIQUES   Ce changement qui pourrait paraître anodin a des implications thérapeutiques. En effet, en 2015 le traitement initial proposé était le suivant : GOLD A un bronchodilatateur (BD) (sans préciser si c’est ou non à la demande ni la durée d’action), GOLD B un BD longue action (LA) soit bêta-2 agoniste (LABA) soit antagoniste muscarinique (LAMA), GOLD C un LAMA, GOLD D LAMA ou LABA+LAMA ou LABA+CSI (corticostéroïde inhalé). Ensuite si ce premier traitement n’était pas suffisant, les patients symptomatiques recevaient LABA+LAMA ou LABA+CSI et en dernière option LABA+LAMA+CSI. Pour les patients exacerbateurs les étapes suivantes étaient LABA+LAMA+CSI puis biothérapie ou azithromycine(9). Le bien-fondé de ces recommandations a ensuite été évalué dans de nombreux travaux, notamment des études en vie réelle. Une étude observationnelle américaine colligeant des données de soins primaires de patients BPCO de juin 2019 à novembre 2020 a montré que les traitements d’entretien les plus couramment prescrits étaient l’association LABA+CSI (30 %) et LABA+LAMA+CSI (27 %) ; 3 % des patients étiquetés BPCO n’étaient pas traités, 9 % avaient un bronchodilatateur à courte durée d’action en monothérapie et 4 % avaient un CSI en monothérapie. Cette prise en charge n’était pas optimale, puisque 38 % des patients avaient eu une ou plusieurs exacerbations en 12 mois. L’insatisfaction des patients quant à leur traitement apparaît à travers les avis recueillis sur le registre Advancing Patient Experience BPCO : 43 % signalaient un impact élevé ou très élevé de la maladie sur leur santé, 45% un score d’essoufflement de 2 ou plus et 50 % une ou plusieurs exacerbations au cours des 12 derniers mois(10).   LA PLACE DES BITHÉRAPIES   Autre point à discuter, le bénéfice d’une bithérapie bronchodilatatrice à action prolongée par rapport à une monothérapie a été évalué dans une étude prospective chez des patients BPCO à faible risque d’exacerbation. L’efficacité d’une association LAMA+LABA était comparée à celle d’un LAMA seul et d’un LABA seul sur les symptômes et sur la prévention de l’aggravation de la maladie. À la semaine 24, le VEMS dans le bras bithérapie était significativement plus élevé que dans les bras LAMA et LABA seuls (respectivement +66 mL et +141 mL ; p < 0,001) ; l’association LAMA+LABA faisait mieux que chacune des monothérapies sur la symptomatologie et sur la prévention de la détérioration. Les profils de tolérance étaient similaires dans les 3 bras de l’étude. Ces résultats suggèrent le bien-fondé de proposer une utilisation précoce d’une association LAMA+LABA chez les patients symptomatiques présentant un faible risque d’exacerbation et ne recevant pas de corticostéroïdes inhalés(11). Restait à savoir si une bithérapie LAMA+LABA était ou non préférable à l’association LABA+CSI, une des options proposées chez les patients du groupe D dans le rapport GOLD 2015. L’efficacité et l’innocuité de l’association bromure d’aclidinium/ fumarate de formotérol deux fois par jour ont été comparées à celles de l’association salmétérol/propionate de fluticasone chez des patients atteints de BPCO modérée à sévère. À 24 semaines, l’association LAMA + LABA était supérieure à l’association LABA+CSI pour le pic du VEMS. Elle a permis une meilleure bronchodilatation que le traitement LABA+CSI avec des bénéfices équivalents en matière de contrôle des symptômes et de réduction du risque d’exacerbation. Bien que les deux traitements aient été bien tolérés, il y a eu moins de pneumonies dans le groupe LAMA+LABA que dans celui LABA+CSI(12). L’augmentation du risque de pneumonie chez patients BPCO recevant CSI seul ou associé à un bêta-2-agoniste a été confirmée dans l’étude TORCH(13). Les facteurs de risque de pneumonie étaient l’âge ≥ 55 ans, un VEMS < 50 %, des exacerbations au cours de l’année précédant l’étude, un score de dyspnée > 2 et un IMC < 25 kg/m2. Il n’y a pas eu de décès dû à une pneumonie. Ces résultats incitent à être prudent en cas d’utilisation de CSI chez les patients BPCO. En outre, les corticostéroïdes réduisant la fréquence des exacerbations de BPCO (principalement d’origine infectieuse) tout en augmentant paradoxalement le risque d’autres infections respiratoires, une étude a évalué l’impact de l’utilisation d’une CSI sur la charge microbienne des voies respiratoires chez les patients BPCO(14). Les auteurs ont montré que comparé à un bêta2-agoniste seul, une association bêta-2 agoniste +CSI est associée à une augmentation significative de la charge bactérienne des crachats (p = 0,005) et à une modification de leur composition microbienne avec une augmentation des bactéries potentiellement pathogènes. Fait important à souligner, l’augmentation de la charge bactérienne était observée uniquement chez les patients traités par CSI qui avaient initialement des taux bas d’éosinophiles dans les crachats ou dans le sang mais pas chez ceux avec des taux d’éosinophiles de base plus élevés.   LES ÉTAPES DU TRAITEMENT EN 2023   L’ensemble de ces données a guidé les nouvelles propositions thérapeutiques établies dans la dernière révision du rapport GOLD de 2023(8). Ne sont désormais pris en compte que deux niveaux de symptômes A et B et un seul pour les exacerbations, tous les patients étant rassemblés dans le groupe E. Le traitement initial, chez les patients peu symptomatiques (A) repose sur la prescription d’un BD (sans autre précision. Insuffisamment améliorés, ces patients devront prendre en continu un BD longue action (LABA ou LAMA), puis si besoin une association LAMA+LABA. En revanche les patients du groupe B reçoivent d’emblée une association LABA+LAMA, tandis que ceux du groupe E auront soit une bithérapie LABA+LAMA, soit une trithérapie LABA+LAMA+CSI (pour ceux dont le taux sanguin d’éosinophiles est supérieur à 300 cellules/µL). Si l’association LABA+LAMA ne suffit pas et si le taux d’éosinophiles est inférieur à 100 cellules/µL, on ajoutera une biothérapie (roflumilast : inhibiteur des PDE-4) ou un antibiotique (azithromycine). Si le taux d’éosinophiles est supérieur à 100 cellules/µL, on pourra proposer une triple thérapie LABA+LAMA+CSI et si ça ne suffit toujours pas on ajoutera roflumilast ou azithromycine. Au total, le nouveau rapport GOLD insiste sur la gravité des exacerbations, indépendamment des symptômes ; il privilégie l’association LAMA+LABA qu’il propose d’emblée chez les patients très symptomatiques et chez tous les exacerbateurs et il réserve les CSI aux triples thérapies chez les patients exacerbateurs avec des taux d’éosinophiles supérieurs à 300, voire à 100 cellules/µL. D’après la communication du Dr Antonio Anzueto (San Antonio, Texas) ERS 2023

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