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Asthme

Publié le 06 avr 2022Lecture 5 min

Mieux naviguer entre les biothérapies antiasthmatiques

Caroline GUIGNOT, D’après la session « Biothérapies dans l’asthme : comment s’y retrouver ? » CPLF 2022

Parce que le nombre de biothérapies antiasthmatiques s’étoffent, les critères de choix se complexifient. Focus sur quelques questions pratiques auxquelles se confrontent les praticiens.

La cohorte longitudinale MAS, qui a suivi plus d’un millier d’enfants allemands, a montré qu’environ 12 % d’entre eux avaient 2 ou 3 comorbidités allergiques à l’âge de 20 ans, la plupart associant asthme et dermatite atopique(1). En pratique clinique, les sujets atteints d’asthme allergique sont aussi nombreux à présenter une autre comorbidité allergique, et sont souvent sévères. Dans ce contexte, quels sont les preuves disponibles sur le bénéfice collatéral des biothérapies antiasthmatiques sur les allergies associées ? Dans la rhinite allergique (majoritairement saisonnière), l’omalizumab permettrait de réduire le score des symptômes et le recours au traitement de secours(2). De même, les données relatives au dupilumab 300 mg montrent l’amélioration des symptômes de rhinite allergique, perannuelle ou non(3). Dans la dermatite atopique, seul le dupilumab dispose de données convaincantes avec une amélioration du score EASI et du prurit chez les asthmatiques traités par des posologies de 200 ou de 300 mg(4). Les données concernant l’omalizumab sont contradictoires ; quant aux anti-IL-5/IL-5R, les données sont rares, et ces molécules potentiellement associées à des événements indésirables à type d’eczéma. Enfin, les données relatives à l’omalizumab chez l’enfant souffrant d’allergie alimentaire sont encourageantes, avec une augmentation des doses réactogènes et une diminution de la fréquence des réactions accidentelles anaphylactiques, au profit d’une meilleure qualité de vie perçue par les enfants et les parents(5). COMMENT TRAITER LES PATIENTS NON-T2 On sait que la classification des asthmes entre des phénotypes T2 et non-T2 telle que présentée il y a une dizaine d’années ne résout pas tous les problèmes cliniques. Ces deux catégories s’avèrent hétérogènes : les premiers représentent un groupe d’expression clinique variable avec un phénotype souvent fluctuant en fonction du temps, les seconds étant définis en miroir des T2, sans biomarqueurs spécifiques offrant une classification pertinente. Ceci étant dit, il est globalement bien décrit que les biothérapies actuelles sont peu ou pas efficaces chez les patients non-T2 ou T2-low. L’utilisation des macrolides (azithromycine), décrite par deux études cliniques (AZIZAST(6) et AMAZES(7)), s’avère possible chez les patients non éosinophiliques, conduisant à une réduction significative des exacerbations. Cependant, les risques de toxicité et de sélection bactérienne au long cours doivent rendre leur usage très limité. De nouvelles biothérapies sont disponibles ou en développement : si l’évaluation du brodalumab (anti-IL-17A) n’est pour l’heure pas convaincante(8), les molécules ciblant les alarmines (IL-33, TSLP) sont plus encourageantes. Pour rappel, ces protéines sont produites en cas d’agression de l’épithélium bronchique, indépendamment de leur nature (allergènes, microorganismes, polluants...) et enclenchent différentes cascades inflammatoires. Le tézépélumab (anti-TSLP) est celui dont le développement est le plus avancé, avec des données positives d’étude de phase 3 (NAVIGATOR(9)) menée chez des asthmatiques sévères de plus de 12 ans et non contrôlés (dont 26 % avaient des éosinophiles < 150/μL et 40 % une FeNO2 < 25 ppb) : si son efficacité croît avec l’éosinophilie, le tézépélumab apporte tout de même une réduction de 39 % du taux d’exacerbations à 52 semaines (critère principal d’évaluation) chez ceux ayant la plus faible éosinophilie (< 150/μL). Son bénéfice est plus modeste en termes de fonction respiratoire, de contrôle de l’asthme (ACQ-6) ou de la qualité de vie dans ce dernier groupe, versus ceux à forte éosinophilie. Les premières données aujourd’hui disponibles concernant l’itépékimab (anti-IL-33) sont celles d’une étude de preuve de concept(10) qui a montré qu’après 12 semaines, 19 et 22 % d’asthmatiques modérés à sévères traités par itépékimab et par dupilumab avaient une taux de perte de contrôle de l’asthme après diminution progressive de la corticothérapie orale (CSO), contre 41 % sous placebo. COMMENT CHOISIR UNE SECONDE LIGNE DE TRAITEMENT L’évaluation de l’efficacité d’une première ligne de traitement nécessite de s’assurer du phénotypage (prick-tests, dosages d’IgE totales, NFS multiples, FeNO, examen ORL) et de la prescription (diagnostics différentiels, diagnostics associés, sévérité, observance...) réalisés initialement. Elle doit intégrer la tolérance, les effets secondaires, la satisfaction du patient et l’atteinte des objectifs thérapeutiques prédéfinis : réduction des exacerbations, de la CSO, amélioration de la qualité de vie ou du contrôle de l’asthme... initialement discutés et mis en regard avec ceux du patient. L’échec thérapeutique ne peut être posé avant 4 à 6 mois d’une bonne observance, et idéalement plus longtemps puisque l’efficacité des biothérapies est progressive, la saisonnalité potentiellement déterminante pour les symptômes et parce que certains critères d’évaluation nécessitent suffisamment de recul (réduction des exacerbations, de la CSO...). S’il est facile de définir une non-réponse ou une réponse complète, il existe une zone grise : celle des répondeurs partiels. Les recommandations sur l’attitude thérapeutique à adopter dans ce cas sont hétérogènes selon les pays. De même, il n’existe pas de règles formelles concernant l’attitude à suivre lorsque différents paramètres cliniques n’évoluent pas avec la même ampleur ou dans le même sens. La décision individuelle et partagée avec le patient apparaît donc indispensable, comme l’indiquent les recommandations de l’EASI(11). Dès lors, quelle molécule choisir ? Pour l’heure, plusieurs séries rapportent l’efficacité d’un switch entre les différents Ac disponibles, mais des études cliniques randomisées seraient nécessaires. Outre les critères de l’AMM, les facteurs prédictifs de bonne réponse et les éventuelles comorbidités, notamment allergiques, orientent la décision, qui doit idéalement être menée collégialement lorsque la situation est complexe. Dans cette décision, un phénotype allergique initial ou l’existence de comorbidités restent probablement valables, mais il est plus difficile de savoir si l’éosinophilie observée au diagnostic doit rester un paramètre de choix, une fois atténuée par la première ligne de traitement. En attendant des études dédiées ou l’enseignement issu du suivi de cohortes, il existe, à l’inverse, des données suggérant d’écarter certaines approches : ainsi, un switch de l’omalizumab vers un anti-IL-5/IL-5R doit être très précautionneux en cas d’allergie alimentaire associée car le seuil réactogène peut revenir à son niveau initial. Par ailleurs, une hyperéosinophilie réactionnelle a été décrite chez une partie des patients switchant depuis le mépolizumab vers le dupilumab, dont certaines peuvent être symptomatiques et potentiellement graves.

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