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Asthme

Publié le 07 juin 2015Lecture 8 min

Sport de compétition et asthme

L. TETU, Service de pneumologie, hôpital Larrey, CHU de Toulouse

La littérature sur les relations entre l’asthme et le sport est très riche, mais celle-ci s’intéresse essentiellement aux athlètes, c’est-à-dire à des sportifs de haut niveau s’entraînant au minimum 20 heures par semaine.Il existe peu de données sur les modalités du traitement de l’asthmatique pratiquant une activité sportive régulière et non intense. Néanmoins, la prise en charge thérapeutique ne doit pas être différente. L’utilisation trop fréquente et exclusive de bêta-2-mimétiques doit être considérée comme un signe de mauvais contrôle de l’asthme et indique l’introduction d’une corticothérapie inhalée.

L’intérêt pour les rapports entre activités sportives et pathologies respiratoires, en particulier l’asthme, a connu d’importantes fluctuations sur quelques années. Le sport a d’abord été considéré comme potentiellement dangereux chez l’asthmatique, avant d’être fortement recommandé, parfois à l’exemple de sportif à la carrière exceptionnelle malgré leur asthme comme Mark Spitz ou Alain Bernard. Cette image idyllique a récemment été un peu ternie par la publication de travaux signalant une fréquence élevée des symptômes respiratoires d’allure asthmatique chez les sportifs de haut niveau et l’augmentation parallèle de la consommation, plus ou moins justifiée, de traitements antiasthmatiques.   L’asthme du sportif est-il différent ? L’asthme du sportif peut se présenter sous deux formes : l’asthme « classique » et l’asthme « induit par l’exercice ». L’asthme « classique » est la présentation clinique la plus fréquente. Souvent, c’est cette pathologie qui a incité la pratique sportive chez l’enfant. L’asthme « induit par l’effort » est favorisé par la pratique du sport à haut niveau. Alors que dans l’asthme « classique », l’obstruction bronchique et les symptômes surviennent au décours de l’exercice, de nombreux athlètes de haut niveau se plaignent d’une gêne respiratoire à l’acmé de l’effort. Cette symptomatologie particulière pourrait s’expliquer par les hauts débits ventilatoires développés par ces sujets. Les mécanismes physiopathologiques impliqués ne sont pas parfaitement élucidés et pourraient varier selon le type de sport. L’hyperventilation d’exercice induirait une déshydratation de la muqueuse bronchique, une libération de neuropeptides suivie d’une extravasation plasmatique compensatrice.   Comment traiter l’asthme du sportif ? La grande majorité des asthmatiques pratiquant un sport inhale un β-2-mimétique quelques minutes avant l’effort. Cette attitude a été recommandée par la communauté médicale dans son ensemble. Hors, il semblerait que cette démarche « thérapeutique » ne soit pas la plus adaptée. Des études de suivi longitudinal de la fonction respiratoire chez des asthmatiques pratiquant la natation ou le ski de fond à haut niveau ont montré des résultats préoccupants. Chez ces sportifs ne prenant aucun traitement de fond, il a été mis en évidence une chute de leur VEMS non physiologique (figure 1).   Figure 1. Évolution du VEMS d’un skieur de fond au cours de sa carrière sportive (•) et de la valeur prédite selon l’équation de Sherrill (triangle), d’après S. Vergès (Scand J Med Sci Sports 2004 : 14 ; 381-7).   Certains skieurs de fond ont eu une chute du VEMS de plus de 600 ml après une dizaine d’années d’entraînement intensif, non réversible à l’arrêt de la pratique sportive. Cette dégradation de la fonction respiratoire a été également constatée dans une moindre proportion chez des nageurs finlandais. L’évolution aurait peut-être été différente sous traitement de fond… Par ailleurs, il semble difficile de ne pas proposer un traitement de fond chez un sportif ayant une fonction respiratoire normale au repos et des symptômes d’asthme qu’à l’effort, mais qui améliore son VEMS de plus d’un litre sous bronchodilatateurs (figure 2).   Figure 2. Exemple d’une réversibilité nettement significative (VEMS + 1 080 ml et + 27 %), alors que les paramètres ventilatoires au repos sont normaux, chez un rugbyman français présélectionné pour la Coupe du monde de rugby en 2003, ayant des symptômes d’asthme à l’effort.   Des études plus rigoureuses renforcent cette idée. Il est désormais bien démontré que la prise régulière de β-2-mimétiques de courte ou de longue durée d’action induit une réduction de leur efficacité sur le bronchospasme à l’effort. Cette perte d’efficacité suggère l’induction d’une tolérance très rapide, survenant dès la première semaine de traitement par β-2-mimétiques (figure 2). Ainsi en 2013, l’American Thoracic Society ne recommandait plus leur utilisation systématique et régulière avant un effort. En revanche, la prise d’une corticothérapie inhalée en traitement de fond s’avère efficace sur la prévention d’un bronchospasme à l’effort dès la 1re semaine de traitement. Cet effet bénéfique est maximal à la 3e semaine de traitement et se maintient dans le temps. Ceci est bien démontré par une métaanalyse récente. Un traitement de fond par antileucotriènes serait également efficace, mais dans une moindre mesure.   Mesures préventives Quelques mesures simples peuvent également permettre de prévenir l’apparition de symptômes et la chute du VEMS à l’effort chez l’asthmatique. Il est bien démontré qu’un échauffement progressif, comparé à un échauffement fractionné, est plus efficace. Pour certains auteurs, une alimentation pauvre en sel et en tomate, riche en oméga-3 et en vitamine C est recommandée chez le sportif asthmatique. Enfin, le port de masques serait intéressant chez les skieurs de fond pour réchauffer et humidifier l’air froid et sec qu’ils inhalent.   Le point sur la législation Tout sportif licencié à une fédération, quels que soient son âge et son niveau, est susceptible de subir un contrôle antidopage. En cas de contrôle positif, la responsabilité du sportif est dite « objective » : la seule présence d’une substance interdite dans un prélèvement suffit à fonder la violation des règles, sans qu’il soit nécessaire de prouver l’intention d’améliorer, par cette prise, ses performances sportives. Toute substance interdite impliquée dans un traitement médical doit donc faire l’objet d’une procédure d’autorisation d’usage à des fins thérapeutiques (AUT) afin de permettre au sportif son utilisation. Jusqu’en 2013, cette réglementation s’appliquait notamment pour les β-2-mimétiques et les corticoïdes qui ont un effet dopant avéré. Les premiers sont utilisés pour leurs effets stimulants et anabolisants, les seconds pour leurs actions anti-inflammatoires et euphorisantes. Désormais, trois β-2-mimétiques ne figurent plus sur la liste des substances interdites et ne nécessitent plus le recours à une AUT : le salbutamol (< 1 600 µg/24 h), le formotérol (< 54 µg/24 h) et le salmétérol (< 100 µg/24 h), administrés par inhalation conformément au schéma thérapeutique recommandé. En revanche, la terbutaline n’est pas autorisée sans AUT, en raison de ses effets anabolisants bien connus à fortes doses. L’utilisation de glucocorticoïdes par voie non systématique, et donc par voie inhalée, est également autorisée sans aucune procédure requise. La présence dans l’urine de salbutamol à une concentration > 1 000 ng/ml ou de formotérol à une concentration > 30 ng/ml sera présumée ne pas être une utilisation thérapeutique intentionnelle et sera considérée comme un résultat d’analyse anormal, à moins que le sportif ne prouve lui-même par une étude de pharmacocinétique contrôlée que ce résultat anormal est bien la conséquence de l’usage d’une dose thérapeutique par inhalation jusqu’à la dose maximale indiquée ci-dessus.   En conclusion L’asthme d’un sportif ne doit pas être traité différemment. L’utilisation exclusive de β-2mimétiques de courte durée d’action avant l’effort est possible, si l’asthme est par ailleurs bien contrôlé. La présence de symptômes à l’effort malgré la prise de β-2-mimétiques ou leur consommation quotidienne signifie que l’asthme est mal contrôlé et indique la prescription d’un traitement de fond. En effet, la consommation fréquente de β-2-mimétiques induit une tolérance et une réduction de leur efficacité. Une corticothérapie inhalée est alors recommandée, et son efficacité sera maximale après 3 à 4 semaines de traitement. La législation a été récemment simplifiée et permet l’utilisation du salbutamol, du formotérol et du salmétérol dans le respect de la posologie prescrite. La terbutaline n’est plus autorisée sans une AUT. En cas de doute, il ne faut pas hésiter à entrer en con tact avec l’Agence française de lutte contre le dopage (www.afld.fr).

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