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Asthme

Publié le 15 aoû 2016Lecture 6 min

Spécificités de l’asthme et de la BPCO chez la femme

C. RAHERISON-SEMJEN, Université de Bordeaux, INSERM BPH U1219, Service des maladies respiratoires, pôle cardio-thoracique, Haut-Lévêque, CHU de Bordeaux

L’asthme et la BPCO font partie des maladies bronchiques les plus fréquentes, mais il existe des spécificités cliniques de ces affections chez les femmes, qui sont souvent mal connues.

Spécificités de l'asthme Avant l’adolescence, l’asthme est plus fréquent chez les garçons, tandis qu’après il atteint plus les filles(1). Parmi les facteurs étiologiques avancés, des facteurs anatomiques, avec la notion d’un calibre des voies aériennes plus petit (ou d’une croissance plus lente) chez le garçon(2,3), mais qui serait rapidement compensé après l’adolescence, et un risque accru de sensibilisation vis-à-vis des allergènes les plus courants(4). L’existence d’un sous-diagnostic des symptômes d’asthme chez les filles, du moins jusqu’à ce que les symptômes deviennent sévères avant l’adolescence, pourrait expliquer ces différences en partie : on parle de syndrome de Yentl. Dans une étude transversale de 120 000 adolescents âgés de 12 à 18 ans, le fait d’être une fille était significativement associé à un sous-diagnostic de sifflements fréquents OR : 1,45 [1,35-1,54](5). Les hospitalisations pour asthme demeurent plus fréquentes chez les filles à l’adolescence et à l’âge adulte(6). Un sur-risque de mortalité lié à l’asthme reste constamment retrouvé chez les femmes asthmatiques(7). Concernant la sévérité de l’asthme, la cohorte TENOR a retrouvé une fréquence de femmes(8) plus importante alors qu’en population générale dans le cadre de l’European Community Respiratory Health Survey (ECRHS), nous n’avions pas retrouvé de différence homme/femme(9). Concernant les facteurs de risque environnementaux, la fréquence accrue de symptômes d’asthme était significativement associée au fait de cuisiner au gaz chez les femmes(10). Un lien avec l’utilisation de sprays a également été retrouvé(11). Parmi les autres facteurs d’environnement, le surpoids ou l’obésité seraient également associés à un risque accru d’asthme plutôt sévère chez les femmes(12). Les femmes seraient plus à risque de développer un asthme non allergique comparativement aux hommes(13). L’hyperréactivité bronchique pourrait varier au cours du cycle hormonal, avec une augmentation de celle-ci en période péri-menstruelle(14). Ainsi, 30-40 % des femmes auraient une aggravation de leur asthme en période péri-menstruelle(15) pouvant se manifester par un asthme moins bien contrôlé ou par la survenue d’exacerbations, et ce d’autant plus si l’asthme est sévère(8). L’hypothèse hormonale reste forte car il existe des récepteurs aux hormones sexuelles exprimés dans l’épithélium et le muscle lisse bronchique. Les hormones sexuelles pourraient contribuer à la contraction du muscle lisse bronchique, et aux phénomènes inflammatoires(16). Au cours de la grossesse, la prise en charge de l’asthme reste souvent inappropriée avec une sousprescription des corticoïdes inhalés par les médecins, et une inobservance du traitement de fond par les patientes(17). Ce constat persiste lors de la gestion de la crise d’asthme de la femme enceinte aux urgences avec une sous-prescription de bronchodilatateurs de courte durée d’action et de corticoïdes par voie générale(18). Enfin, l’asthme de la ménopause pourrait représenter 18 % des asthmes de la femme, et donc potentiellement constituer un phénotype distinct(19).   Spécificités de la BPCO Désormais, la BPCO dans le monde concerne autant les femmes que les hommes, bien qu’il existe des disparités géographiques(20). Deux raisons principales sont évoquées pour expliquer ce constat : une augmentation du tabagisme féminin dans les pays développés d’une part, et une exposition accrue des femmes aux fumées domestiques résultant de combustion des biomasses dans les pays en voie de développement d’autre part ; source principale de pollution intérieure dans des locaux mal ventilés(21). En France, la mortalité par BPCO a augmenté chez les femmes de 1,7 % par an au cours des dernières années(7). Il faut également ajouter à l’interprétation des données, le fait que la BPCO reste une affection sousdiagnostiquée chez les hommes comme chez les femmes, et possiblement sous-estimée chez les femmes fumeuses par les médecins(22). Plus récemment, une étude américaine poolant 3 cohortes successives (19591965, 1981-1988, 2003-2008) a montré que les décès pour BPCO étaient en augmentation. Le risque relatif de décès par BPCO liée au tabac a plus que doublé entre les années 1980 et 2000, en particulier chez les femmes(23). La millenium cohorte a montré que la BPCO était la première cause de mortalité chez les femmes fumeuses en Grande-Bretagne(24). Sur le plan clinique, J.P. De Torres(25) a comparé 2 groupes de 53  hommes et 53  femmes atteints de BPCO. À obstruction bronchique égale, les femmes étaient plus jeunes (57 ans vs 65 ans ; p < 0,05), elles fumaient moins (48 paquets années vs 69 paquets années ; p < 0,05) et avaient un indice de masse corporelle plus bas (25 vs 28 ; p < 0,05), un nombre plus important d’exacerbations, et moins de comorbidités. Elles avaient de moins bonnes performances au test de marche de 6 minutes (87 % de la valeur prédite vs 105 % ; p < 0,05 et une qualité de vie mesurée par le questionnaire Saint-Georges plus altérée (score des symptômes 51 vs 41, p < 0,05). Dans le cadre de l’étude NETT, F.J. Martinez et coll. retrouvaient les mêmes résultats(26), avec un emphysème moins étendu chez les femmes, mais sa répartition différait légèrement entre le centre et la périphérie du poumon. Certains ont rapporté une répartition plus importante de l’emphysème dans les zones apicales du poumon chez les femmes(27). Dans la cohorte Eclipse avec un suivi sur trois ans, un déclin de la densité pulmonaire évaluée par TDM était plus marqué chez les femmes(28). Les femmes BPCO pourraient avoir une atteinte bronchique plus marquée(29). Ceci a déjà été suggéré par des études fonctionnelles montrant que les femmes atteintes de BPCO avaient une hyperréactivité bronchique et une réversibilité après bronchodilatateurs plus importantes que les hommes. Une vulnérabilité accrue chez les filles comparativement aux garçons vis-à-vis de la fumée de tabac avait déjà été évoquée dans une cohorte de plus de 10 000 adolescents suivis sur le plan fonctionnel une fois par an(30). Il existe de plus un déclin accéléré de la fonction respiratoire chez les femmes fumeuses après la ménopause(31). Nous avons pu montrer dans une étude récente(32) que les femmes BPCO étaient plus jeunes que les hommes, avaient plus souvent un BMI < 21 kg/m2, et des comorbidités associées différentes (ostéoporose, anxiété, dépression). À sévérité égale, la BPCO reste responsable d’une altération de la qualité de vie plus marquée chez les femmes, bien corrélée avec l’existence d’une expectoration.

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